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Lens (62)

Douleurs de l’exil

Louvre-Lens – jusqu’au 20 janvier 2025

Par Marie Zawisza · L'ŒIL

Le 21 octobre 2024 - 348 mots

De l’antiquité à nos jours -  Une rue orientale aux immeubles dont les façades ont été détruites par des bombardements et qui tentent de tenir debout.

Le sol est jonché de décombres et de vestiges de la vie d’avant : ici une petite table, là une étagère, ailleurs un ventilateur, ou un vélo abandonné… Si l’on regarde bien, on aperçoit au milieu de ces ruines, devant ce qui reste d’un immeuble, une femme assise, une mère ou une grand-mère, la tête tombée en avant sur la poitrine. Est-elle morte ou pleure-t-elle ? On ne sait. Les deux, sans doute. Voici mon cœur, c’est le titre de cette sculpture monumentale, comme une maquette, d’un artiste exilé de Syrie, Khaled Dawwa (né en 1985), qui donne à voir le quartier de la Ghouta à Damas, après le bombardement au gaz sarin ordonné, en 2013, par Bachar al-Assad. De façon exceptionnelle, l’artiste est autorisé à remanier sans cesse cette œuvre entrée dans les collections nationales, conservée au MuCEM, à Marseille. Une façon de rendre tangible le travail de deuil qui s’opère en lui. Cette sculpture est sans doute l’une des pièces contemporaines les plus bouleversantes de l’exposition du Louvre-Lens, « Exils, regards d’artistes ». À travers un parcours de près de 200 œuvres, cette exposition pose une question : que fait l’exil à la création ? Les pièces les plus anciennes remontent à l’Antiquité – représentant par exemple Ulysse, qui n’est pas reconnu par sa femme Pénélope après son long exil consécutif à la guerre de Troie. D’Ithaque au VIIIe siècle av. J.-C., à Damas aujourd’hui, à travers des œuvres d’Élisabeth Vigée Le Brun, Gustave Courbet, Victor Hugo, Marc Chagall, Pablo Picasso ou Zao Wou-Ki, c’est une certaine histoire de l’humanité qui se déroule sous nos yeux : celle des départs, des déracinements, des rencontres, de l’accueil, qui traversent les temps et les géographies. Prolongeant cette exposition poétique au long de laquelle les œuvres se font écho les unes aux autres par-delà les siècles, le catalogue propose également deux très beaux textes littéraires de la poétesse syrienne Hala Mohammad et de l’écrivain Kamel Daoud.

« Exils, regards d’artistes »,
Louvre-Lens, 99, rue Paul-Bert, Lens (62), www.louvrelens.fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°780 du 1 novembre 2024, avec le titre suivant : Douleurs de l’exil

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