Art moderne

Camille Claudel révélée

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 février 2003 - 392 mots

Si l’on sait les amours tumultueuses et créatrices de Rodin et de Camille Claudel, on ne connaît pas toujours ce qu’il en a été de la période d’apprentissage de la jeune artiste.

On ignore le plus souvent le rôle déterminant qu’a joué auprès d’elle, avant même Rodin, le sculpteur Alfred Boucher. Originaire de Nogent-sur-Seine, il avait fait la connaissance de Camille Claudel à l’époque où la famille de celle-ci y demeurait, c’est-à-dire entre 1876 et 1879. Auteur d’une série d’œuvres d’inspiration sociale contribuant à célébrer le monde rural, qui lui valut le surnom de « Millet de la sculpture », Boucher était alors un artiste en renom. Lorsque Camille Claudel s’installe à Paris en 1881, Boucher la présente à son ami sculpteur Paul Dubois qui s’étonne du talent de la jeune femme : « Vous avez pris des leçons avec Monsieur Rodin ! », s’exclame-t-il. Camille n’a que dix-sept ans, elle n’a encore jamais rencontré Rodin. Alfred Boucher qui entretient d’excellentes relations avec celui-ci – il l’a notamment défendu en 1880 afin qu’il obtienne la fameuse commande de la porte du musée des Arts décoratifs, future Porte de l’Enfer – les présente l’un à l’autre. Forte de cette première part biographique, l’exposition du musée Dubois-Boucher de Nogent-sur-Seine, consacrée à Camille Claudel, s’applique à mettre en lumière l’évolution de l’art de cette étonnante artiste, son génie naissant, la révélation de son talent au contact tant d’Alfred Boucher que de Rodin. On y mesure ainsi la dimension sinon naturaliste du moins vériste que l’un lui a apportée tandis que l’autre lui insuffle une rare force d’expression, confortant les extrêmes de son tempérament en quête d’une puissante identité. En rassemblant une cinquantaine de ses œuvres – marbres, bronzes, plâtres, terres cuites... – issues de la collection de sa petite-nièce et une vingtaine tant de Boucher que de Rodin, cette exposition met en scène Camille Claudel dans l’histoire sensible et intime de ses relations avec ces deux artistes. Elle est aussi l’occasion pour la ville de Nogent de préfigurer ce qui pourrait être un musée Camille Claudel. Une façon de rendre hommage à celle qui y a passé – disent certains de ses biographes – les plus belles années de sa vie, notamment à la découverte de la sculpture.

Nogent-sur-Seine, musée Dubois-Boucher, rue Gué de la Loge, tél. 03 25 39 71 79, 1er février-4 mai.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°544 du 1 février 2003, avec le titre suivant : Camille Claudel révélée

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