Bulatov et Molodkin, formidables enfants terribles de l’art !

Ces deux artistes russes ne sont pas de la même génération mais ils se connaissent bien. La « puissance » de leur travail est superbement portée par une scénographie particulièrement dynamique. Dans cette ancienne halle industrielle de verre, de fer et de pierre datant du début du XXe siècle, leurs œuvres « pas faciles » apparaissent superbement mises en espace par Becky Haghpanah-Shirwan et Pierre-Olivier Rollin, commissaires de l’exposition. Erik Bulatov, ancien étudiant au prestigieux Institut des beaux-arts Vassili Sourikov de Moscou dans les années 1950, présente des toiles monumentales sur lesquelles on peut lire les lettres « HACPATb », ce qui signifie littéralement « chier sur ». Formellement inspirées du constructivisme, ses peintures en noir, rouge et blanc rigoureusement exécutées provoquent aussi de troublantes tensions plastiques entre profondeur et planéité. En écho agité et bruyant à ces implacables présences, la vaste installation d’Andrei Molodkin immerge le visiteur dans un univers sonore et visuel fiévreux associé à la Drill Music, un sous-genre musical très violent né dans les années 2010 dans les quartiers sud de Chicago. Projetés en grand sur les murs de la salle plongée dans l’obscurité, des mots se succèdent, formant des phrases chocs extraites de paroles de morceaux de Drill Music diffusés sur Internet et souvent censurés. Sur ces mots se superposent des projections visuelles de coulées de sang humain pulsées par des pompes pneumatiques transparentes. Impressionnant !