Le musée investit l’ensemble de ses salles avec un ensemble exceptionnel de 390 œuvres, peintures, sculptures, dessins, estampes et arts décoratifs, montrant la vitalité de la création bisontine au XVIIIe siècle.
La Franche-Comté est une région qui a vu éclore quelques-uns des fleurons du patrimoine de l’Hexagone : elle est en effet la terre natale de Pasteur, de Courbet et de célèbres fromages, que l’on ne présente plus ! Et pourtant, cette province n’a été rattachée que tardivement au royaume de France. Jusqu’à sa conquête par Louis XIV, ce riche territoire dépendait du Saint-Empire romain germanique pendant plus de six siècles ! La prise de Besançon en 1674, à laquelle assiste le souverain en personne, constitue alors un fait politique majeur et un tournant pour cette province. Le magistral tableau de Van der Meulen, qui ouvre en fanfare l’exposition, accompagné de dessins préparatoires d’une qualité prodigieuse, permet de revivre cette conquête qui s’apparente à un tremblement de terre géopolitique. On sentirait presque l’odeur de l’humus, le fracas des canonnades, mais aussi l’agitation des soldats et des chevaux. Car, outre une remarquable fresque historique, le propos de l’exposition est bien de faire ressentir au visiteur l’atmosphère de l’âge d’or qu’initie cette conquête militaire. Le destin de Besançon et de sa province bascule en effet à la fin du XVIIe siècle, la région devenant une vitrine de l’art de vivre à la française. Jusqu’à la Révolution, la cité se couvre ainsi d’un blanc manteau de monuments prestigieux célébrant le nouveau pouvoir : un parlement, un tribunal, mais aussi pléthore d’églises à la dernière mode. S’ajoute à cela une nuée d’hôtels particuliers pour héberger la noblesse de robe et d’épée qui y élit domicile. À telle enseigne que la ville conserve encore aujourd’hui l’un des plus riches patrimoines du siècle des Lumières. La présence d’une importante élite encourage aussi évidemment l’activité de nombreux artistes et artisans, dont quelques maîtres injustement méconnus, tel l’immense sculpteur Luc Breton. Ce Bisontin, bien mal nommé, est assurément la révélation de l’exposition. Ses groupes sculptés au modelé vibrant présentés en dialogue avec les grands tableaux peints pour les églises de la ville et de la région marquent durablement l’esprit des amoureux du XVIIIe siècle. Nul besoin d’être croyant pour ressentir la transcendance face à ces chefs-d’œuvre présentés de manière immersive et magistrale. Tout le parcours est à l’avenant, multipliant les effets de surprise et les idées originales de scénographie. À l’image de ce mur rempli à ras bord de tableaux de Wyrsch et Gresly tels qu’on les accrochait alors, qui fait voisiner les scènes de genre illustrant les petits métiers et les humbles gens, donnant l’impression de pouvoir pratiquement entamer une discussion avec ces personnages typiques de l’époque. Sentiment encore renforcé par la présence d’éléments mobiliers et d’objets du quotidien. Tout aussi ingénieuse est l’accumulation d’ex-voto, des plus classiques aux plus extravagants, qui restitue habilement la ferveur religieuse de l’époque. En un mot comme en cent : une superbe exposition qui magnifie les œuvres et un solide travail scientifique.
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Besançon revit son âge d’or
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°761 du 1 janvier 2023, avec le titre suivant : Besançon revit son âge d’or