PARIS
Pour la mémoire collective, Berthe Morisot est cette jeune femme qui pose pour Le Balcon d’Édouard Manet.
C’est en copiant les chefs-d’œuvre du Louvre qu’elle a rencontré l’artiste déjà célèbre. Elle deviendra son modèle privilégié jusqu’en 1874. On lui doit, entre autres œuvres de Manet, Berthe au bouquet de violettes. À une époque où il n’était pas simple pour une femme de s’imposer dans le monde de l’art, on observe qu’elle fut une artiste indépendante – elle a tourné le dos très jeune à l’enseignement académique du peintre Chocarne-Moreau. Dès 1864, elle expose au Salon et fréquente un milieu d’artistes renommés : Degas, Bazille, Mallarmé, Cros, Manet… En 1874, elle fonde la Société anonyme des peintres, sculpteurs et graveurs avec Monet, Renoir, Pissarro et Degas. Lors de la première exposition impressionniste dans l’atelier Nadar, elle est la seule femme peintre. Elle y présente plusieurs tableaux, dont Cache-cache, représentant une femme et son enfant en plein air. C’est l’année de son épanouissement personnel, bien que ses détracteurs lui reprochent son « barbouillage indéchiffrable ». Berthe Morisot privilégie les scènes de la vie moderne, les rituels de la vie domestique, en extérieur ou à l’intérieur, les escapades champêtres, le monde de l’enfance, les portraits croqués dans l’intimité. Elle peindra de nombreuses figures en plein air, en particulier sa fille Julie. Les formes sont toujours floues dans les tableaux de Berthe Morisot, mais une vie étrange les anime, car ses touches vibrantes appliquées par empâtements légers donnent vie à toutes choses. Elle fut quelque peu oubliée, mais fut redécouverte à la fin du XXe siècle à la faveur d’expositions consacrées à l’impressionnisme. L’importante sélection du Musée d’Orsay donne l’occasion aux visiteurs d’apprécier cette grande artiste à la mesure de son talent.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°725 du 1 juillet 2019, avec le titre suivant : Berthe Morisot, pour elle-même