Conclusion d’une longue campagne de restauration, « La couleur retrouvée » présente les vingt et un tableaux de Giovanni Bellini conservés aux Galeries de l’Académie. L’exposition retrace un moment crucial de l’histoire de l’art, celui de l’émancipation progressive de la couleur.
VENISE (de notre correspondante) - Les Galeries de l’Académie constituent certainement le musée le plus riche en œuvres de Giovanni Bellini, vingt et une exactement. Ces toiles et toutes celles qui sont conservées dans la région vénitienne ont fait l’objet d’une campagne de restauration, travail mené depuis quinze ans sous la houlette de la Direction générale des beaux-arts. Aux vingt et une peintures de l’Académie s’en ajoute une provenant de l’étranger, L’Ivresse de Noé, la dernière peinte par l’artiste, prêtée par le Musée de Besançon. Le choix d’une présentation chronologique permet de reconstruire un moment crucial de l’histoire de l’art, celui de l’émancipation progressive de la couleur, patiemment étalée avec des glacis superposés, grâce aussi à l’utilisation de nouveaux liants. La restauration de la Pietà, exécutée au début du XVIe siècle, a fait par exemple ressortir la complexité tridimensionelle du pré, obtenue grâce à la superposition de cinq strates de couleurs (vert, blanc et jaune) mélangées de manières diverses. Du reste, on n’économisait pas sur les matériaux : pour le manteau de la Madone, le bleu a été fabriqué à partir de lapis-lazuli et le violet avec une laque rouge. Même la robe de l’ange, sur la petite porte de l’orgue dédiée à l’Annonciation, a retrouvé sa couleur bleue, intensifiée dans les plis par des reflets violacés.
Invisible depuis quinze ans
La restauration la plus importante a cependant concerné L’Assomption, une des deux œuvres de grandes dimensions de Bellini avec la Madonne à l’Enfant au trône de l’église San Pietro Martire, à Murano. L’Assomption, ou, selon Rona Goffen, L’Immaculée Conception, que l’on peut dater entre 1510 et 1513, n’était plus visible depuis quinze ans. Elle avait été placée par mesure de précaution dans le laboratoire de restauration de San Gregorio. “L’état de conservation de la toile était très précaire”, explique la directrice des Galeries de l’Académie, Giovanna Nepi Scirè, commissaire de l’exposition avec Rona Goffen, “notamment à cause de l’état de dégradation de l’église. C’est pour cette raison que l’œuvre ne sera pas restituée à son emplacement d’origine avant que les conditions ambiantes adéquates ne soient garanties.” Pour les mêmes motifs de sécurité, on n’a pas déplacé les chefs-d’œuvre de Bellini qui se trouvent dans les autres musées de la ville, nationaux ou municipaux, comme la Fondation Querini Stampalia, et dans les églises Santa Maria dei Frari, Santi Giovanni e Paolo, San Zaccharia, San Giovanni Crisostomo, San Salvador, où figure le Souper à Emmaüs sans doute exécuté par Vittore Carpaccio sur le dessin de Bellini.
- LA COULEUR RETROUVÉE. BELLINI À VENISE, jusqu’au 29 janvier, Gallerie dell’Accademia, Venise, tél. 39 041 522 47, tlj 9h-19h, dimanche et lundi 9h-14h.
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Bellini reprend des couleurs
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°113 du 20 octobre 2000, avec le titre suivant : Bellini reprend des couleurs