PARIS
Le Musée des arts décoratifs détient de fabuleuses collections de photographies. Onze ans après sa réouverture, « Histoires de photographies » met enfin en lumière ces fonds qui n’avaient jamais été présentés.
L’angle choisi par Sébastien Quéquet n’est pas de raconter l’histoire des collections dont il a la charge (pour cela, il faut se reporter au catalogue), mais de rappeler les vocations et les usages des fonds de photographie au sein de l’institution, constitués dès la création en 1864 de l’Union centrale des beaux-arts appliqués à l’industrie, actuel « Mad ». Qu’elle travaille pour la création textile, le décor, l’architecture, la mode, la publicité ou pour l’édition, la photographie est, dès le XIXe, une source d’inspiration. Les créateurs de papier peint ou de décors floraux trouvent leurs modèles dans les photographies de fleurs d’Eugène Atget, d’Aldolphe Braun, de Charles Aubry comme dans les merveilleux cyanotypes de 1895 d’Henri Bodin. La photographie de voyages, de paysages et de patrimoine ne réserve pas moins de superbes tirages d’époque d’auteurs illustres, tels Désiré Charney ou Henri Le Secq, comme des photographies de la guerre de 14-18, plus inattendues en ces lieux. Chaque étape du parcours dévoile ainsi une histoire spécifique. Ainsi, la période de l’entre-deux-guerres, abordée via la commande publicitaire ou éditoriale, met en avant le rôle de ces deux secteurs dans la dynamique de la photographie d’avant-garde de cette époque. La salle intitulée « Photographier la mode » illustre, elle, la dimension documentaire de la photographie pour les costumiers ou historiens de la mode, tout en mettant en lumière l’origine de ces tirages (essentiellement des tirages de travail ou des tirages de presse). Au fil des salles, le visiteur mesure le rôle joué par l’institution dans l’histoire et la diffusion de l’image fixe. C’est au Musée des arts décoratifs que fut organisée, en effet, la première exposition d’Henri Cartier-Bresson (1955) ou de Jacques-Henri Lartigue (1975) en France. Jusqu’au début des années 1980, qui virent l’émergence de nouveaux lieux d’expositions dédiés, l’institution de la rue de Rivoli fut un lieu phare pour la programmation d’expositions photo et la (re)découverte de photographes.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°744 du 1 juin 2021, avec le titre suivant : Au Mad, la photo sort enfin de sa réserve