De leur métier à leurs particularités en passant par leurs apparences, les bâtisseurs font l’objet d’une riche et vaste exposition à la Cité de l’architecture et du patrimoine.
Paris. La manière dont les architectes ont été représentés tout au long de l’histoire, voilà un sujet inédit pour la Cité de l’architecture et du patrimoine qu’Emmanuel Bréon et Bénédicte Mayer (respectivement conservateur et attachée de conservation à la Cité) et Philippe Rivoirard (architecte) ont choisi de traiter par l’exhaustivité. « L’architecte, portraits et clichés » est donc une exposition qui frappe par sa densité et sa richesse. Elle n’est pas avare en œuvres et types de mediums exposés (plus de 400 sculptures, peintures, gravures, photographies, films, BD, jouets…), en périodes abordées (neuf sections chronologiques, de l’Antiquité à la période contemporaine en passant par le Grand Siècle ou les « trente glorieuses ») ni en figures d’architectes déroulées au sein du parcours (plus de 150).
En dépit d’un sujet pas facile (l’architecte n’est pas forcément le professionnel qui a les caractéristiques les plus saillantes aux yeux du grand public), l’ambition a payé. Les commissaires ont su écrire une intéressante histoire de la conception du métier d’architecte, où se dessine en creux un beau portrait de l’architecte en Occident.
Au Moyen Âge, l’architecte est avant tout considéré comme un bâtisseur et est régulièrement immortalisé dans la pierre, la version miniature de l’édifice qu’il a construit dans la main (dalle funéraire d’Hugues Libergier, maître d’œuvre de l’ancienne église Saint-Nicaise de Reims). À la Renaissance, l’architecture a pris sa place parmi les arts savants et la figure gravée de l’architecte illustre volontiers les traités dont il est l’auteur (L’architecture de Philibert Delorme, 1576). Au XVIIe siècle, l’architecte à la faveur des plus grands artistes (ainsi le buste de Jules Hardouin-Mansart, surintendant des bâtiments du Roi, dont la majesté n’a rien à envier à Louis XIV), honneur qui traduit sa position de notable de plus en plus installé. À la Belle Époque, marquée par la multiplication des Expositions universelles et des débats houleux autour de l’architecture, il arbore parfois les signes de l’artiste, au risque d’apparaître un peu bohème (ainsi Charles Le Cœur saisi en élégant jardinier par Auguste Renoir).
Si les « starchitectes » contemporains ne sont pas les plus présents du parcours – « il s’agissait de ne pas faire de jaloux parmi les vivants », confie Emmanuel Bréon –, on retient une représentation mordante de Frank Gehry en plein processus créatif (une boule de papier froissée inopinément devient la maquette d’un futur opéra) dans un épisode des Simpson, dessin animé réputé immortaliser avec une rare acuité les grandes figures de notre société.
Le parcours aurait pu s’arrêter là, mais s’intéresse aussi à la formation des artistes, les outils du métier et les liens entre architectes et commanditaires, trahissant la volonté de la Cité de l’architecture et du patrimoine de regarder plus largement qu’une simple histoire de la profession. Dense, l’exposition, qui sait souvent se montrer ludique, réussit la prouesse de ne pas lasser.
Rares sont les architectes à avoir marqué de leur personnalité et de leur style leurs contemporains au point d’être représentés à grande échelle. Parmi ceux qui ont largement inspiré les artistes – et les caricaturistes – Charles Garnier, bâtisseur de l’Opéra a qui il a donné son nom, mérite une section à lui seul que lui offre l’exposition en montrant sept représentations de celui surnommé « l’Indien », pour son teint mat et ses cheveux en bataille. Le petit portrait qu’a fait de lui Jean-Léon Gérôme confère à l’architecte un air inquiétant que l’on retrouve sur un tirage de Nadar.
Jacques-Émile Blanche, Robert Mallet-Stevens, 1933, huile sur toile, Musée des Années Trente, Boulogne-Billancourt. © Photo : Musée de la Ville de Boulogne-Billancourt/ Philippe Fuzeau.
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Architectes sous tous les angles
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 4 septembre 2017, Cité de l’architecture et du patrimoine, 1 place du Trocadéro et du 11 novembre, 75016 Paris.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°482 du 23 juin 2017, avec le titre suivant : Architectes sous tous les angles