Considérés chez nous comme des curiosités, les thèmes développés par Nobuyoshi Araki font encore scandale dans son pays d’origine, le Japon.
Un univers rigide, terriblement coincé, y est mis à rude épreuve dans ses travaux. Ceux-ci ne font que refléter les tensions, les déchirements, les délitages d’une société agitée par de vieux démons devenus, avec le temps, incontrôlables. Tel son matérialisme, largement inspiré du modèle américain, et qui tend à rompre avec un concept religieux pourtant cher au cœur des Japonais, le culte de l’harmonie. Araki, comme d’autres artistes de sa génération, se débat au cœur de violentes contradictions dans le but de restaurer cette incertaine harmonie. En vis-à-vis d’images de quartiers non identifiables, témoignant d’une décadence urbaine qui en soulignerait une autre plus large, il place dans un cadre dépouillé jusqu’au clinique, au médical, des pratiques érotiques anciennes actualisées par le simple regard et la technique du photographe. Les jeux de rôles pratiqués par Araki, voyeur-consommateur-exhibitionniste, n’étaient-ils pas courants durant la période Ukiyo-E, vers la fin du XVIIIe siècle ? En adoptant le modernisme occidental à la fin de l’ère des shoguns Tokugawa, au milieu du XIXe, le Japon fit en même temps peser sur ses pratiques artistiques le poids de notre puritanisme. C’est lui que Araki veut aujourd’hui défier, de manière systématique, obsessionnelle. Sans doute aussi éprouve-t-il une certaine jubilation à provoquer une censure parfaitement hypocrite dans son rôle d’allié objectif du voyeur ordinaire.
PARIS, Centre national de la Photographie, 13 septembre-27 novembre.
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Araki contre la censure
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°519 du 1 septembre 2000, avec le titre suivant : Araki contre la censure