À Angoulême, les expositions « Quelques instants plus tard… » et « Dalí par Baudouin » interrogent à leur manière les liens entre les deux catégories.
La rencontre de l’art et de la bande dessinée ne date pas d’hier. Christian Balmier, directeur de la galerie parisienne Petits Papiers qui expose des originaux de BD, en fait le constat : « En fait, ces deux mondes se croisent, se mêlent et nourrissent l’un pour l’autre une attention complice. Au XXe siècle, le pop art (Hergé aimait beaucoup Roy Lichtenstein), la Figuration narrative (au nom signifiant), la Figuration libre (baptisée par Ben), etc., tous ces mouvements contemporains se sont largement inspirés de la bande dessinée. Et Warhol considérait que le plus grand peintre du XXe siècle était Walt Disney ! » La BD ferait donc partie de l’art contemporain et le marché de l’art ne s’y serait pas trompé.
Les rencontres se font de plus en plus nombreuses
Ces dernières années, les rencontres se sont même multipliées. Certaines, notoires, se sont déroulées à la Maison rouge (« Vraoum ! », 2009), à la Fondation Cartier (Moebius, 2011) et à la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image d’Angoulême (« Une autre histoire : bande dessinée, l’œuvre peint », 2012). Qui n’a pas en mémoire l’exposition-somme de 1990 « High and Low: Modern Art and Popular Culture » au MoMA de New York où une importante section était consacrée à la BD ? Cette exposition historique constatait à quel point le « low » (l’art populaire) avait influencé le « high » (l’art savant). Et il n’est pas rare de voir désormais des artistes (Jochen Gerner, Marjane Satrapi, Séra…) investir les deux domaines, alternant cases de planches BD et productions plus grandes, voire installations, pour musées et galeries.
Bref, ces dernières années, BD et art contemporain font plutôt bon ménage. Christian Balmier, commissaire de l’exposition « Quelques instants plus tard… », précise : « Au fil de riches rencontres, nous avons pu constater que les artistes du neuvième art connaissaient le plus souvent très bien l’art contemporain, ayant partagé la même formation dans les mêmes écoles d’art. Nous avons appris aussi que des artistes contemporains pouvaient aussi être des amateurs éclairés, férus de bande dessinée. »
La bande dessinée, un art contemporain…
Ainsi en est-il de « Quelques instants plus tard… bande-dessinée et art contemporain » qui, à Angoulême, fait dialoguer sous forme de duos artistes contemporains et auteurs de bande dessinée : pas moins de quatre-vingts créateurs ont répondu à l’appel de Gilles Ciment, directeur de la Cité d’Angoulême, pour confronter leur travail dans des œuvres à quatre mains, Ben s’accordant avec Baudouin, Di Rosa avec Hardy, etc.
Proche du cadavre exquis, cette création collaborative donne parfois lieu à de réjouissantes parties de ping-pong (Alain Declercq et Milo Manara). Mais engendre aussi des pièces hybrides où la greffe ne prend pas : difficile par exemple de s’enthousiasmer devant la toile grandiloquente signée Le Cloarec et Druillet. Et c’est tant mieux, car on découvre ainsi que, derrière une concorde certes bienvenue entre ces deux univers créatifs, il reste encore des tensions et des questionnements nécessaires pour faire de l’art, sous toutes ses formes, un champ ouvert à la recherche.
Le plasticien Hervé Di Rosa souligne à raison : « La relation BD-art contemporain de cette exposition m’intéresse comme cabinet de curiosités ; ce qui compte, ce sont les liens établis, pas les résultats. En outre, il faut dire aux bédéistes que ce n’est pas le lieu, le format ou le marché qui fait l’art et rappeler aux plasticiens que la BD n’est pas une expression marginale pour petits et grands, mais un véritable phénomène de société qui embrasse le réel. » Voilà qui est dit.
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À Angoulême, la rencontre de la BD et de l’art actuel
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°654 du 1 février 2013, avec le titre suivant : À Angoulême, la rencontre de la BD et de l’art actuel