Le photographe et cinéaste américain au ton libre et novateur, saisissant l’énergie des villes, s’est éteint à Paris où il était installé depuis l’après-guerre.
Paris. Photographe et cinéaste, l’iconoclaste William Klein est parti à l’âge de 96 ans. Il est parti, mais il laisse derrière lui des photographies, des films et des livres pleins de vitalité et d’esprit libertaire qui ont bouleversé les codes visuels et influencé nombre de photographes et de cinéastes. « Je n’ai jamais essayé de faire de la photographie objective, ni de faire du cinéma objectif. On n’est pas fidèle à la réalité, on est fidèle à soi-même. On ne peut voir que certaines choses, d’une certaine façon », disait-il. De fait, très tôt, l’audace et le besoin constant d’expérimenter ont caractérisé son itinéraire artistique.
Né à New York en 1926, Klein a d’abord étanché sa soif d’apprendre dans la littérature et les musées de Manhattan avant de gagner Paris, dix-huit ans plus tard, avec le désir de devenir peintre. Son passage dans l’atelier de Fernand Léger lui « ouvre les yeux » sur le Quattrocento, sur Masaccio en particulier, tandis que la rencontre avec Jeanne Florin, peu de temps après son arrivée à Paris, lui fait choisir Paris comme port d’attache. La découverte de l’abstraction, de De Stijl, du Bauhaus et de l’art cinétique, mais aussi du graphisme, influence à partir de 1952 ses premiers pas en photographie. Le photogramme et d’autres procédés anciens revisités aboutissent à une explosion de créations graphiques qui séduisent des revues comme Domus et des maisons de disques. Mais lorsqu’Alexander Liberman, directeur artistique du magazine Vogue New York, découvre son travail au Salon des réalités nouvelles, il l’invite à revenir dans sa ville natale. Un voyage qu’il chronique dans un journal photographique mordant, rythmé, jazzy. Il prend des images de rues à bout portant, au milieu de la foule, pour des clichés « brutaux », des tirages charbonneux. Le livre qu’il met lui-même en pages, prix Nadar 1957, est tout aussi novateur. Son édition par Chris Marker, alors responsable de la collection « Petite Planète » au Seuil, marque le début d’une amitié indéfectible et l’amène à rencontrer d’autres cinéastes comme Varda, Resnais, Fellini ou Pasolini.
Les années qui suivent le voient mener de front la photographie et le cinéma tout en collaborant avec la mode, la télévision et la publicité. Ses livres sur Rome (1956), Moscou (1961), ou Tokyo (1962) témoignent de son désir constant d’être au plus près des gens, tandis qu’il signe son premier court métrage avec Broadway by Light. Puis il délaisse pendant vingt ans la photographie pour le cinéma à partir de Qui êtes-vous, Polly Maggoo ?(1966), prix Jean-Vigo en 1967, qui ouvre une période riche en films coups de poing, engagés contre la guerre du Vietnam ou envers la cause noire… « Klein découpe la réalité en Klein comme Van Gogh la découpait en Van Gogh », disait Chris Marker. Avec les « contacts peints », qu’il fera tirer en très grand format pour sa rétrospective au Centre Pompidou en 2003-2004, William Klein expérimente une nouvelle fois. Tout dernièrement, la galerie Le Réverbère à Lyon, qui le représente depuis trente ans, offrait à cet égard un exceptionnel éventail de vintages de ses différentes périodes.
Une erreur s'est glissée dans le JdA no 595 (23 sept. 2022) : William Klein est né en 1926 et non en 1928 comme il est écrit.
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William Klein (1926-2022)
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°595 du 23 septembre 2022, avec le titre suivant : William Klein (1928-2022)