Peintre engagé et représentant majeur de la figuration narrative, Gérard Fromanger s’est éteint, à l’âge de 81 ans.
Paris. Gérard Fromanger a rendu son dernier souffle le 18 juin dernier en fin de matinée à la Pitié-Salpêtrière. Il avait 81 ans. Du souffle, justement, il n’en avait jamais manqué lui qui avait même réalisé une série d’œuvres « Souffles », composées de douze demi-sphères en altuglas transparent de cinq couleurs différentes, montrées à Paris, deux fois en 1968 et une fois en 2005. Pour celui qui avait surmonté un cancer du poumon au début des années 2000 et une rechute il y a trois ans, le souffle, c’était surtout la vie, la ville, la place de la Bastille, les rues, le « Boulevard des Italiens » (titre d’une série de tableaux de 1971), les passants, les amitiés, la Toscane où il avait également un atelier… Le quotidien en somme, et donc les couleurs, toutes les couleurs qui étaient devenues sa signature. Même s’il avait privilégié le rouge dans les années 1968-1971 au point de faire couler le rouge du drapeau français sur le bleu et le blanc, de réaliser à ce propos avec Jean-Luc Godard le film-tract n°1968 Le Rouge et de voir Jacques Prévert évoquer dans un poème le « rouge Fromanger » , l’artiste nous avait déclaré : « Dans mon travail, les couleurs ont toutes le droit de cité et le droit de se battre entre elles pour exister. Je suis démocrate avec les couleurs. »
Mais avant la couleur, Gérard Fromanger, né en 1939 à Pontchartrin (Yvelines) dans une famille de peintres et passé par l’académie de la Grande Chaumière, avait d’abord travaillé cinq ans (de 1957 à 1962) en noir, blanc et gris pour peindre des figures dans la droite ligne d’Alberto Giacometti. Ces œuvres ont d’ailleurs été exposées à la galerie Aimé Maeght. Et c’est pour se libérer de cette influence qu’il va passer à la couleur. En 1964, l’exposition « Mythologies quotidiennes » lance le mouvement de la figuration narrative dont il deviendra peu de temps après l’un des représentants majeurs. Puis vient Mai 68 et l’atelier populaire des Beaux-Arts (de Paris) dont il sera, dès la première heure, l’un des militants les plus actifs et engagés.
Après cette période dominée par le rouge, sa palette reprend des couleurs. Fromanger va même les hisser jusque dans les titres de ses expositions, à l’exemple de « Tout est allumé » en 1980 au Centre Pompidou ou « Annoncez la couleur » dans une petite dizaine d’institutions en France de 2014 à 2021 ou encore « De toutes les couleurs » à la galerie Jeanne Bucher en 2018. Cette dernière lui rendra d’ailleurs un hommage, ainsi que Caroline Smulders lors de la Fiac en octobre prochain. Ces couleurs, avec lesquelles il faisait le portrait de ses amis (Michel Foucault, Félix Guattari, Gilles Deleuze...), celles qu’on avait pu voir encore une seconde fois au Centre Pompidou en 2016 (accompagné d’un film de son ami Serge July) et celles qui dominent le café du théâtre des Bouffes du Nord, sa dernière réalisation.
À la question « Que peignez-vous ? » que nous lui avions posée un jour, il avait répondu : « Je peins ce que je vois […] Mais c’est évidemment beaucoup plus complexe […] Dire ce que je vois ne peut pas suffire. Il faut le voir justement. Sinon, ce ne serait pas la peine que je peigne. »
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La disparition de Gérard Fromanger
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°570 du 25 juin 2021, avec le titre suivant : La disparition de Gérard Fromanger