Société

Ai Weiwei met en ligne un documentaire saisissant sur le confinement à Wuhan 

Par Lorraine Lebrun · lejournaldesarts.fr

Le 27 août 2020 - 434 mots

MONDE

Le film oppose les images de propagande à un confinement brutal imposé à des millions d’habitants.

Un ambulancier se fait désinfecter dans la ville de Wuhan, extrait du film Coronation, 2020. © Ai Weiwei
Un ambulancier se fait désinfecter dans la ville de Wuhan, extrait du film Coronation, 2020.
© Ai Weiwei

Le pouvoir chinois ne va pas apprécier la dernière œuvre d’Ai Weiwei. L’artiste dissident a dévoilé la semaine dernière sur les réseaux sociaux son documentaire surprise, réalisé dans le plus grand secret. Disponible depuis le 21 août dernier sur la plateforme de VOD Vimeo, Coronation offre un panorama de près de 2 heures sur ce que fut le confinement sous le joug du régime chinois dans le foyer d’origine de l’épidémie. 

Les images, saisissantes, rappellent la démesure de l’événement. Wuhan fut la première ville à avoir été placée en confinement strict par les autorités chinoises, le 23 janvier. Ce sont 11 millions d’habitants sommés de rester chez eux. Peu d’images filtrent. La télévision officielle diffuse des images d’hôpitaux suréquipés où tout est sous contrôle, tandis que quelques vidéos apparaissant furtivement sur les réseaux sociaux montrent une réalité moins glorieuse. 

De son côté, Ai Weiwei a saisi l’occasion de documenter la machinerie du Parti communiste à l’œuvre durant cette période inédite. Grâce à une équipe d’une douzaine de Wuhanais présents sur place et filmant pour lui, l’artiste a dirigé et réalisé son film depuis l’Europe où il est exilé depuis 5 ans. Plus de 500 heures d’images de première main, qu’il s’est ensuite attelé à trier et monter pour aboutir à ce film couvrant par séquences chronologiques la vie dans une mégapole muselée durant onze semaines. L’artiste donne peu de détails sur la façon dont les images ont été récupérées ; au New York Times, il dit seulement que son équipe a utilisé des caméras de la taille d’un smartphone.

Hommage aux personnels soignants, le film souligne l’efficacité avec laquelle la crise a été gérée en Chine – pour rappel, il n’y a eu que 4 700 décès en Chine contre 177 000 aux Etats-Unis. Mais s’interroge aussi : « La civilisation peut-elle survivre sans une forme d’humanité ? ». L’artiste s’attache ainsi à montrer l’étendue du contrôle étatique, sa capacité à surveiller tous les aspects d’une société mais aussi sa brutalité, emprisonnant chez eux les citoyens. Face à l’effervescence des hôpitaux construits en des temps records, le documentaire s’attache à suivre des individus dont les destins sont ébranlés, redonnant une identité à cette foule masquée et anonymisée. 

Ai Weiwei n’en est pas à sa première action en lien avec la pandémie. Tout au long du mois de juin, il avait vendu sur Ebay des milliers de masques « sérigraphiés à la main » , à la fois pour lutter contre l’anonymisation des foules et pour lever des fonds pour des associations humanitaires.
 

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