PARIS
Voici dix questions clés pour se repérer dans l’univers des prépas aux écoles d’art, savoir ce qu’on attend d’un candidat à l’entrée et comment choisir la sienne.
En matière d’offre, on distingue les classes prépas à temps plein délivrées par les écoles d’art (supérieures ou municipales), celles délivrées par les lycées et les filières privées. Il existe également des formules plus souples sous la forme de cours hebdomadaires ou de stages, mais elles n’offrent pas la même immersion en profondeur. A contrario des filières privées qui intègrent plusieurs dizaines, voire des centaines d’inscrits, les prépas publiques mettent en avant leurs effectifs à taille humaine, de vingt à trente élèves, ce qui facilite un suivi individualisé. On en trouve une vingtaine réparties sur toute la France.
Les classes préparatoires aux études supérieures – classes d’approfondissement en arts plastiques (CPES-CAAP) sont proposées en lycées publics et privés sous contrat. On en compte une dizaine. Conventionnées avec des départements arts à l’université, elles permettent d’accéder au statut étudiant et de valider le niveau L1 de licence, utile pour élargir la poursuite des études et sécuriser le parcours des étudiants. « Ces classes peuvent convenir à un étudiant qui cherche à être très encadré et à rester dans le système du lycée », estime Emmanuel Hermange, président de l’Association nationale des prépas publiques aux écoles supérieures d’art (APPÉA). « Au sein d’une école d’art, l’élève de prépa sera dans un environnement plus transversal et plus autonome. »
Si le bac est requis, il n’est pas précisé de série en particulier. Dans les faits, on retrouve en majorité des bacheliers généraux, prédisposés par leur culture générale et leur entraînement à l’écrit. Des dérogations existent pour les non-bacheliers. Quelques rares filières ne comportent pas de limites d’âge, c’est le cas notamment des Ateliers beaux-arts de la Ville de Paris qui accueillent chaque année des étudiants plus âgés.
Si l’on considère la prépa comme l’antichambre d’une école d’art, un candidat à l’entrée doit faire preuve d’un goût marqué pour l’art. Celui-ci se mesure à la fois en termes de pratique régulière et diversifiée et aussi d’une grande curiosité pour le domaine. « Lors d’un entretien, un jeune doit transpirer la passion pour ce qu’il vise », résume Olivier Di Pizio, coordinateur de la classe prépa des Ateliers beaux-arts de la Ville de Paris.
Il n’est en revanche pas nécessaire d’être un as du dessin pour intégrer une telle filière. « Il y a un niveau minimum requis dans la plupart des écoles, mais il ne s’agit pas d’un dessin académique, plutôt d’une pratique régulière et naturelle », observe encore Olivier Di Pizio. Pour rassurer ceux qui ne se sentiraient pas à l’aise en dessin, le site Internet de la prépa d’Angoulême précise que « la formation propose de nombreuses heures de dessin pour progresser » et qu’« il existe de nombreux moyens d’expression à part le dessin ». En revanche, et quel que soit le médium choisi, il est important de « faire montre d’une pratique régulière (photographie, collage, couture, volume, etc.) ».
« Nous préférons les dossiers artistiques qui ne sont pas parfaits techniquement, mais dans lesquels on sent une forte personnalité artistique », prolonge Luc Chopplet, coordinateur de la classe prépa Via Ferrata. « Lors de l’entretien, la question de l’appétit culturel est très importante, renchérit son collègue Nicolas Pilard, en charge de la prépa des beaux-arts de Marseille. Le jury a besoin de sentir une motivation forte pour le domaine de l’art, tant en termes de pratiques artistiques concrètes que d’intérêt pour le champ de l’art en général. Il faut aussi montrer une connaissance succincte de la réalité du secteur. On observe régulièrement des malentendus, par exemple avec des étudiants qui s’intéressent au tatouage. » Il est donc plus que recommandé de se rendre aux journées portes ouvertes des écoles, pour avoir un minimum d’informations sur le contenu et la réalité de ces études.
Elles visent en priorité les écoles supérieures d’art et de design françaises et leurs homologues européennes. Certaines filières proposent des spécificités à l’instar des Ateliers beaux-arts de la Ville de Paris avec ses trois options : Architecture/design d’espace, pour les écoles supérieures d’architecture et du paysage ; l’option Art, pour les écoles supérieures d’art et d’arts décoratifs, et l’option Images, pour les écoles spécialisées dans ce domaine (Gobelins, École nationale supérieure de la photographie d’Arles, La Cambre, Tournai). Les ateliers préparatoires de l’École professionnelle supérieure d’arts graphiques de la Ville de Paris (EPSAA) ouvrent à un champ plus large que les seuls concours des écoles des beaux-arts. La filière vise aussi les établissements d’arts appliqués, notamment dans le domaine du graphisme et du cinéma d’animation.
Par ailleurs, il est à noter que les enseignants incitent généralement les élèves à présenter plusieurs concours, trois ou quatre au minimum.
Chaque année, quelques élèves issus de prépas sont admis dans une école d’art européenne telle que la Haute école d’art et de design (HEAD) à Genève, l’ECAL à Lausanne, La Cambre à Bruxelles, l’Académie royale des beaux-arts d’Anvers, la Central Saint Martins à Londres. En 2018, sept étudiants de la prépa des Arcades ont été reçus à la Gerrit Rietveld Academie d’Amsterdam. Bien entendu, et en dehors des écoles francophones, la maîtrise de l’anglais ou de la langue du pays d’accueil est un prérequis pour intégrer ces établissements.
Les modalités peuvent différer d’un établissement à l’autre. Le recrutement comprend généralement un dossier de candidature (avec les éléments administratifs et une lettre de motivation) et la présentation d’un dossier de travaux personnels. Certains établissements procèdent en deux étapes : dossier artistique pour l’admissibilité, puis entretien pour l’admission. D’autres proposent des écrits et des épreuves plastiques. À l’École d’art de GrandAngoulême, le recrutement se déroule uniquement sur entretien autour de la présentation d’un dossier de travaux et de recherches personnels. À la Via Ferrata, la première étape du recrutement consiste dans l’envoi d’un dossier artistique de 10 travaux et d’un dossier administratif. Sur quelque 350 dossiers reçus, environ 70 sont convoqués à la seconde étape, l’entretien oral, qui permet de déterminer les 25 inscrits. Variable d’une prépa publique à l’autre, le taux de sélection s’établit entre 10 et 30 %.
« Pour ceux qui vont au bout d’une classe prépa publique, 90 % intègrent une école », assure Emmanuel Hermange, président de l’APPÉA. Plusieurs établissements affichent leur taux de réussite ou les écoles obtenues par leurs étudiants, sur leur site Internet. Pour la classe des Arcades à Issy-les-Moulineaux, par exemple, les 32 étudiants ont réussi 98 concours en 2017-2018, soit une moyenne de 3 concours par étudiant. Les taux de réussite vont de 27 (Beaux-Arts de Paris) à 100 % pour certaines écoles (Reims, Saint-Étienne, Quimper). De son côté, la Via Ferrata de l’École nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA) de Paris enregistre 92 % de réussite à au moins un concours en 2017-2018. « Attention aux établissements qui communiquent des chiffres absolus et non de réels taux d’intégration », met en garde Emmanuel Hermange.
La prépa Via Ferrata a été créée en 2016 au sein de l’École nationale supérieure des beaux-arts pour faciliter l’accès aux études supérieures artistiques à un large panel d’élèves issus de la diversité sociale, géographique et culturelle de la région Île-de-France. Les élèves boursiers sont exonérés des frais d’inscription. La Fondation Culture & Diversité organise par ailleurs, en partenariat avec 17 écoles d’art, un programme « égalité des chances » à destination de lycéens d’origine modeste. En février 2018, à l’École supérieure d’art et de design d’Orléans, 27 élèves de terminale ont pu suivre différents ateliers (photographie, peinture, modelage et graphisme), afin d’approfondir leurs connaissances et leur maîtrise technique. Le programme comportait aussi des visites culturelles et des entretiens d’orientation.
On compte une large offre d’établissements privés préparant aux concours des écoles d’arts, situés à Paris et en régions. Certains établissements ont choisi de se spécialiser dans les prépas (Ateliers de Sèvres, Prép’art), quand d’autres proposent ensuite un cursus complet après cette première année. Dans ce cas, la prépa peut être une façon pour l’établissement de prérecruter des élèves. Il est recommandé de venir aux journées portes ouvertes, de vérifier que les tarifs annoncés sont tout compris. Certaines prépas communiquent leurs taux de réussite aux concours, à mettre en relation avec le nombre d’élèves inscrits qui se comptent parfois en centaines.
Dans l’enseignement public, la fourchette de prix varie de 275 euros à Beaune à un peu plus de 2 000 euros à Évry et à Issy, et jusqu’à 3 000 euros à Lyon. Plusieurs petites prépas en régions facturent moins de 1 000 euros les frais de scolarité à l’année. En ce qui concerne le secteur privé, ces frais s’envolent, entre 7 000 et 9 000 euros l’année auxquels s’ajoutent des frais d’inscription (de 350 à 450 euros). Il est toujours bon de vérifier si les prix communiqués par les établissements comprennent ou non les frais de matériel.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°718 du 1 décembre 2018, avec le titre suivant : 10/ questions pour bien choisir sa prépa aux écoles d’art