Art contemporain

États-Unis

Voilà Viola

\"Secrets enfouis\" et contentieux

Par Roger Bevan · Le Journal des Arts

Le 1 juin 1995 - 443 mots

Né en 1951, devenu l’une des grandes figures de l’art vidéo, Bill Viola représente les États-Unis à Venise.

Pour la Biennale, il a créé une œuvre entièrement nouvelle, \"Secrets enfouis\", qui consiste en cinq installations vidéos indépendantes, conçues pour chacune des salles du pavillon américain, mais formant une même séquence narrative. Le sujet est un périple illustrant le caractère transitoire de la vie, thème central de l’inspiration de l’artiste. Son installation débute avec un "Couloir des murmures", qui amorce le périple avec dix projections de têtes monochromes en vis-à-vis, de part et d’autre d’un long corridor étroit et obscur. Viola précise que ces têtes ont "les yeux clos et la bouche étroitement fermée et bâillonnée. Elles tentent de parler, mais leurs voix étouffées sont incompréhensibles". L’installation prend fin avec "L’accueil", une image vidéo en couleurs projetée très lentement, de deux femmes conversant, rejointes par une troisième femme dans un espace industriel non identifié.

Bill Viola, dont on a pu voir des installations à l’American Center à Paris, avait déjà participé à la Biennale de Venise en 1988. Il n’est pas le seul à élargir le langage de l’art vidéo. Des artistes comme Bruce Nauman et Gary Hill se sont engagés sur la même voie. Viola, se sentant en concurrence avec Gary Hill, a d’ailleurs quitté depuis peu son marchand de Seattle, Donald Young, qui les représentait tous les deux. C’est Anthony d’Offay qui défend désormais ses intérêts.

Mais l’exposition au pavillon américain a failli ne pas voir le jour, à la suite de l’affaire Christian Leigh (voir le JdA n° 9, décembre 1994). L’United States Information Agency, responsable du financement et de la supervision de la participation américaine, avait envisagé de l’annuler en protestation contre l’attitude du conseil d’administration de la Biennale, qui, selon elle, n’a toujours pas résolu le contentieux.

Après avoir organisé une exposition au Centre des Zitelle, lors de la Biennale de 1993, Christian Leigh a disparu en laissant des impayés et des chèques sans provision. Les œuvres d’art qu’il avait empruntées aux États-Unis ont été retenues en otage à Venise, en raison des factures non acquittées. L’arriéré se monterait à 100 000 dollars (500 000 francs). Certains collectionneurs exaspérés ont fini néanmoins par récupérer leur bien moyennant finance.

Dans la lettre de protestation qu’il a adressée le 8 mai au président du Conseil italien, Lamberto Dini, Jean Clair écrivait "qu’il était loin de mesurer l’étendue et la fréquence des incidents" qui ont émaillé les Biennales précédentes. "Eusse-je en particulier connu l’affaire Christian Leigh, j’aurais décliné l’offre qui m’était faite et dont j’ai découvert trop tard qu’elle me mettrait dans la position d’un otage d’abord, d’un bouc émissaire ensuite", constatait-il.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°15 du 1 juin 1995, avec le titre suivant : Voilà Viola

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