PLF 2014 - Un budget thérapeutique

Un budget de la Culture très politique

Le projet de budget de la mission Culture pour 2014, tente de corriger le tir après les coupes à la hache de l’an dernier

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 2 octobre 2013 - 953 mots

Le projet de budget de la Culture pour 2014 affiche une baisse de 2 % entièrement compensée par la fin des grands travaux. Contrairement à l’an dernier, Aurélie Filippetti s’est efforcée de fâcher le moins d’acteurs possibles. Le financement du plan sur l’Éducation artistique et culturel pénalise cependant d’autres programmes d'accès à la culture.

Paris - Après les effets fâcheux du budget 2013, en cette année préélectorale, le ministère de la Culture a tout fait pour apaiser les mécontents ou du moins ceux qui sont susceptibles de se faire entendre le plus. La baisse du budget de la mission Culture étant actée depuis le plan triennal, on avait alors beau jeu Rue de Valois de souligner que la diminution inscrite dans le projet de loi de finances 2014, soit 2 %, était au fond une demi-victoire. Une victoire d’autant plus facile que la baisse de 52 millions d’euros (sur un total de 2,576 milliards d’euros) est entièrement couverte par la fin des grands travaux engagés par l’équipe précédente. Il ne s’agit pas tant des ex-nouveaux grands chantiers dont la Maison de l’histoire de France, comme la ministre aimerait le laisser croire, mais du Mucem, de la Philharmonie ou du Centre des archives de Pierrefitte-sur-Seine.

Contrairement à l’an dernier, la baisse est à peu près la même entre le Patrimoine (-4,12 %) et la Création (-3,73 %). Si idéologiquement la gauche a longtemps privilégié le spectacle vivant aux vieilles pierres, ce gouvernement a mieux mesuré les enjeux économiques et sociaux des musées et monuments historiques. Et puis à l’aube de « la grande loi sur le patrimoine » de 2014, plomber le secteur comme en 2013 (-10 %) aurait été contre-productif. Le budget du patrimoine monumental augmente même de 1,07 % à 332 millions d’euros après avoir tout de même perdu 44 millions par rapport à 2012. Le budget des musées baisse, lui, de près de 9 %, en raison de la fin de la construction du Mucem et d’une baisse de la dotation aux grands établissements d’environ 6 millions d’euros. Les crédits d’acquisitions ne changent pas à 8,5 millions d’euros, après avoir été divisés par deux par rapport à 2012. De même, sans retrouver ses crédits de paiement (CP) de 2012 (9,5 millions d’euros), l’archéologie voit ses moyens augmenter de 21 % (8,75 millions d’euros) lui permettant de participer au financement de Lascaux IV, un rescapé de la liste noire, et d’un Pôle de recherches archéologiques en Moselle.

Contrairement à l’an dernier aussi, les CP des arts plastiques augmentent de 1,55 % tandis que ceux du spectacle vivant baissent de 4 % (en raison essentiellement de la fin des travaux de la Philharmonie, 50 millions en 2013 pour 25 millions d’euros en 2014). On a compris Rue de Valois que, compte tenu de la modicité du budget des arts plastiques (63,3 millions d’euros) en regard de celui du spectacle vivant, dix fois plus gros (683 millions d’euros), afficher une hausse ne coûtait pas grand-chose. Le budget du Palais de Tokyo est reconduit à 6,5 millions, tandis que la Collection Lambert bénéficiera d’une subvention de 2,78 millions d’euros. Un fonds d’avance remboursable pour les galeries, géré par l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) va être mis en place. Ces prêts sont destinés à aider les galeries à se développer à l’international, notamment à travers leur participation aux foires.

La partie de bonneteau

Le grand bénéficiaire du budget 2014 semble être le mal nommé programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » dont les CP affichent une hausse de 0,9 % à 1,08 milliard d’euros. Il convient en effet de soustraire de ce montant, le budget du ministère qui est logé traditionnellement dans ce programme, qui pèse tout de même 738 millions d’euros, et dont on note au passage qu’il baisse nettement moins que le budget global (-0,55 %). Il est toujours plus facile de diminuer les crédits d’intervention que les dépenses de l’administration centrale. L’enseignement supérieur (les écoles d’art) représente une grande partie de ce qui reste : 249 millions d’euros sur les 349 millions. Il bénéficie d’une hausse de 7,18 %, histoire de faire oublier la cotutelle avec le ministère de l’Enseignement supérieur.

En revanche la partie de bonneteau continue s’agissant de la démocratisation de la culture. Comme il faut bien annoncer des chiffres flatteurs pour la grande priorité du quinquennat – l’éducation artistique et culturelle (EAC) dont les moyens passent de 30,7 millions d’euros en 2012 à 38 millions en 2014 – on déshabille d’autres programmes qui relèvent pourtant de la pratique culturelle des jeunes, telles les subventions aux écoles de musiques et conservatoires qui perdent 7 millions d’euros, soit l’intégralité de la hausse du plan EAC. Rappelons qu’entre 2012 et 2014, les CP alloués à la démocratisation culturelle et aux enseignements spécialisés ont baissé de 17 %.

La baisse totale du budget du ministère de la Culture (7,26 milliards d’euros) est la même que celle de la mission Culture proprement dite, soit 2 %, la presse, le livre et les industries culturelles payant davantage leur tribut (-7,8 %) que l’audiovisuel (-0,9 %). Elle pourrait même être supérieure si la mise en réserve qui passe de 5 % à 7 % n’était pas « dégelée ». Il convient par ailleurs de saluer la volonté de transparence du ministère qui a remis à la presse des documents « comestibles » et a su se rendre disponible. Le ministère de la Culture et de la Communication est-il « de retour » comme le proclame le dossier de presse ? Cela est très subjectif mais on constate qu’après les errements de la première année, un début de maturité traverse maintenant les couloirs de cette aile du Palais Royal.

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Le ministère de la Culture et de la Communication, au Palais-Royal, Paris. © Photo Didier Plowy/MCC

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°398 du 4 octobre 2013, avec le titre suivant : Un budget de la Culture très politique

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