Collection - Photographie

ENTRETIEN

Le directeur de la Médiathèque du patrimoine et de la photographie commente son actualité

Directeur de la Médiathèque du patrimoine et de la photographie

Par Christine Coste · Le Journal des Arts

Le 5 août 2023 - 758 mots

CHARENTON-LE-PONT

Charenton-le-Pont (Val-de-Marne). Le Fonds Gilles Caron vient d’entrer dans les collections nationales.

Gilles Caron (1939-1970), Vietnam, 1967. © Donation Gilles Caron, ministère de la Culture, MPP.
Gilles Caron (1939-1970), Vietnam, 1967.
© Donation Gilles Caron, ministère de la Culture, MPP.

La Médiathèque du patrimoine et de la photographie (MPP) qui le conserve compte, avec le Musée Nicéphore-Niépce à Chalon-sur-Saône, parmi les rares établissements publics à accepter des fonds photographiques entiers (négatifs, planches-contacts, tirages, publications et archives papier). Depuis l’arrivée de Gilles Désiré dit « Gosset » à la direction en 2015, les donations se multiplient. Après celle du photographe américain Michael Kenna, d’autres sont en cours comme celle de Patrick Zachmann. Des discussions ont également lieu avec Raymond Depardon pour un dépôt de ses archives, lesquelles ont échappé de peu à un incendie l’été dernier. Les photographes inquiets du devenir de leur fonds sont de plus en plus nombreux. Gilles Désiré (qui ne souhaite pas voir publier son portrait), répond à nos questions à ce sujet.

Qu’est-ce qui conditionne l’entrée d’un fonds à la MPP ?

En premier lieu, la volonté de donner. Il faut que les photographes aient envie de travailler avec nous et qu’ils nous fassent confiance. Cette relation nécessite des discussions, et donc du temps. La discussion avec la famille Caron a commencé en 2018 ; la donation a été finalisée en avril dernier. On essaie de trouver la meilleure solution et de préserver les droits des photographes et de leurs héritiers, en sachant que la MPP ne gagnera jamais d’argent avec. Nous n’achetons pas de fonds et un dépôt est normalement préalable à un don, celui-ci ouvrant droit à une défiscalisation. Les donations concernent principalement des photographes professionnels reconnus à travers des expositions, des prix et des publications. La plupart ont déjà réalisé une grande partie de leur carrière, mais certains, comme Patrick Zachmann, continuent d’être très actifs. Un photographe qui a œuvré plutôt sur une région ou un département sera mieux valorisé par des institutions locales : la bibliothèque municipale de Lyon ou le Musée de Bretagne ont des fonds photo importants qu’ils valorisent fort bien.

Un nouveau lieu de conservation, envisagé un temps par le ministère de la Culture, est-il souhaitable ?

Avant que nous reprenions de manière volontariste la politique des donations commencée dans les années 1980, l’État manquait d’un lieu identifié pour conserver des fonds photo complets. Avec le fort de Saint-Cyr (Yvelines), nous disposons d’un réservoir d’espaces quasi inépuisable et notre chaîne de traitement archivistique, qui n’est celle, ni d’un musée ni d’une bibliothèque, est rodée pour accueillir des archives photographiques. Un nouveau lieu entraînerait des frais considérables ; faisons déjà vivre l’existant.

Disposez-vous de moyens et de personnel suffisants pour traiter et valoriser cet afflux de fonds ?

Jusqu’à présent, nous avons les moyens de notre politique et sommes parfaitement soutenus par notre tutelle, le ministère de la Culture. Chaque donation a un coût, d’ailleurs difficilement chiffrable en raison de la spécificité de chacune, mais nous y arrivons.

La MPP a disposé dans le passé d’un espace d’exposition à l’hôtel de Sully, à Paris. Un lieu d’exposition pérenne dans la capitale vous fait-il défaut ?

Non, car si on avait un lieu d’exposition, on y mettrait tous nos moyens pour le faire vivre. Ce serait au détriment des partenariats que l’on développe peu à peu sur l’ensemble du territoire avec une multiplicité d’acteurs culturels comme l’espace Richaud à Versailles, le Musée de Pont-Aven, La Maison à Nevers ou la Villa Tamaris à La Seyne-sur-Mer, qui accueille cet été une exposition Willy Ronis. Avec l’association Diaphane, dans l’Oise, nous développons des expositions itinérantes à destination des scolaires et, lors de la dernière édition d’Usimages, nous avons proposé une exposition « Jean Pottier et l’industrie nucléaire ». Les expositions organisées avec le Jeu de paume au château de Tours ont aussi le mérite de bien circuler à l’étranger.

Vous privilégiez toutefois une valorisation de fonds patrimoniaux plutôt que contemporains. Pourquoi ?

Jacques Henri Lartigue, Willy Ronis et André Kertész sont des noms qui claquent, plus faciles à valoriser et susceptibles d’attirer le public. Il nous faut encore quelques années pour élargir les demandes des partenaires à d’autres photographes. Nous y arriverons. Par ailleurs, les photographes vivants sont les meilleurs acteurs de leur propre promotion et nous les y aidons dans la mesure de nos moyens. Enfin, notre politique de publication est une autre manière de valoriser nos collections, mais aussi d’intéresser des commissaires d’exposition. Chaque année, nous éditons trois ou quatre livres et en soutenons au moins autant : Claude Nori vient de publier celui sur Claude Batho que l’on a soutenu par un préachat ; en octobre sortiront un Zola photographe (Éd. Hermann) et un catalogue des merveilleux albuminés de Séraphin-Médéric Mieusement sur Notre-Dame de Paris (Trans Photographic Press).

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°615 du 7 juillet 2023, avec le titre suivant : Gilles Désiré dit Gosset, directeur de la Médiathèque du patrimoine et de l’architecture : « Il faut que les photographes aient envie de travailler avec nous »

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