PARIS
L’Etat a délivré en novembre dernier le certificat d’exportation de Judith et Holopherne, signifiant ainsi son refus de l’acquérir.
Retrouvé dans le grenier d’une demeure toulousaine en 2014 à la suite d’une fuite d’eau dans la soupente, les propriétaires du tableau avaient contacté Me Marc Labarbe, commissaire-priseur à Toulouse qui s’était ensuite rapproché d’Eric Turquin, expert en tableaux anciens (Cabinet Turquin, Paris). A la suite d’importantes recherches, l’expert l’attribuait à Caravage.
Classé Trésor National le 25 mars 2016, l’Etat avait 30 mois pour se porter acquéreur, soit jusqu’en novembre 2018. A l’issue de ce délai, les propriétaires ont fait une nouvelle demande d’obtention d’un certificat de libre circulation - telle est la procédure - qui a été automatiquement accordé le 16 novembre dernier. En d’autres termes, l’Etat ne souhaite pas acquérir le tableau qui peut désormais être vendu à l’étranger.
Il n’a pas l’obligation de motiver sa décision mais on peut penser que le prix astronomique du tableau - 120 millions d’euros - en est la principale cause. « Dès le départ, l’Etat a tiqué sur le prix énorme. Par ailleurs, il a sans doute d’autres préoccupations, davantage liées au patrimoine français. Et puis la France a déjà cinq tableaux du Maître [trois au Louvre, un à Rouen et un à Nancy, ndlr], ce qui est beaucoup pour un artiste dont on ne connaît que 75 œuvres », précise l’expert.
Le tableau va-t-il être vendu aux enchères ? C’est toute la question. « Il est en cours de nettoyage. Et temps que cette opération ne sera pas terminée, aucune décision ne sera prise, ni par moi, ni par Me Labarbe ni par les propriétaires. Ce sont d’ailleurs eux qui prendront leur décision une fois le tableau entièrement nettoyé », rétorque Eric Turquin. « Ce que je peux dire, c’est que le début du nettoyage est très encourageant et ce qu’on espérait trouver, on le trouve ! », lance l’expert.
En effet, depuis le début de sa découverte, l’œuvre fait débat, certains experts et historiens pensent qu’elle ne serait pas de la main de Caravage. Or, on sait qu’il existe un tableau perdu du Caravage. Ce tableau est connu par une copie qui est dans une collection semi-publique à Naples. « Pour moi, mais aussi pour de nombreux spécialistes dont Keith Christiansen (Metropolitan Museum de New York), Nicola Spinosa (ancien directeur du Musée de Capodimonte), Jean-Pierre Cuzin (ancien directeur du département des peintures du Louvre) … le tableau de Toulouse est l’original perdu. Pour d’autres, c’est une 2e ou une 3e copie, comme celle de Naples », rapporte Eric Turquin. Des analyses poussées ont été diligentées et « selon celles-ci, ce tableau ne peut pas être une copie, car il y a des repentirs qui laissent à penser qu’il s’agit d’une œuvre originale », affirme le spécialiste. « Pour être franc, je ne comprends pas qu’il y ait encore des gens qui hésitent ».
Quoiqu’il en soit, les propriétaires souhaitent vendre l’œuvre. Mais pour l’heure, « on ne sait pas quand, ni comment elle sera vendue. Toute décision prise avant la fin du nettoyage serait prématurée », conclu l’expert.
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Le Caravage découvert à Toulouse ne rejoindra pas les collections françaises
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