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Clap de fin pour la Fondation Nestlé pour l’art en Suisse

SUISSE

La Fondation Nestlé arrête son mécénat, officiellement pour épuisement de ses fonds propres. Un tremblement de terre en Suisse.

Suisse. « S’il existait un “Guide Michelin” des fondations culturelles, celle de Nestlé pour l’art obtiendrait facilement cinq étoiles. » Cette phrase prononcée par un ministre de la Culture français, il y a quelques années, donne la mesure du coup de tonnerre. La Fondation Nestlé pour l’art qui a mis fin à ses activités depuis le 1er janvier 2023, après plus de trente ans d’activité, était un acteur incontournable du milieu.

En 1991, date de sa création à l’occasion du 125e anniversaire de l’entreprise Nestlé, le premier président de la fondation, Paul Jolles, énonçait les bases du projet : « Il ne s’agira pas d’imiter d’une manière ou d’une autre ce que font les autres [les fondations pour l’art sont très nombreuses en Suisse], mais plutôt de trouver une approche originale pour promouvoir les activités négligées jusqu’à présent. » Le pari fut tenu avec le soutien de près de 2 000 projets et le développement de cent cinquante partenariats. Selon Olivier Kaeser, président de la fondation entre 2015 et 2022, ses spécificités étaient nombreuses : « Elle était entièrement dévolue au soutien de la jeune création contemporaine en Suisse. Pour les arts vivants et la musique, elle soutenait en priorité des artistes émergents. Pour les arts visuels, elle soutenait des petites et moyennes structures (espaces indépendants, “artist-run spaces” – galeries gérées par des artistes –, centres d’art, éditeurs indépendants). Elle attribuait des soutiens ponctuels aux projets, et développait des soutiens partenaires sur deux ou trois ans. » En 1991, moins de cent dossiers d’artistes lui furent soumis, quelques années plus tard, elle en recevait huit cents par an. « Proche des milieux artistiques, elle favorisait l’innovation, les prises de risque, l’expérimentation, l’émergence de nouveaux langages. Ses experts étaient des professionnels très actifs dans les terrains artistiques respectifs. Aucune autre fondation en Suisse n’a un fonctionnement similaire, donc le vide se fait sentir », reconnaît Olivier Kaeser.

« Rien ne dure toujours »

Ces activités de mécénat au service de la jeune création suisse sont à distinguer du long « engagement culturel » de l’entreprise-mère Nestlé, soit une mission de sponsor dans le cadre d’événements de prestige. Dotée d’un capital de 25 millions de francs suisses (soit 25 millions d’euros) qui lui assura dès le début une existence financière indépendante de l’entreprise, la fondation vécut sur les revenus du capital jusqu’en 2003, avant de choisir de déterminer en amont un montant annuel à allouer à ses activités année par année pour éviter les soubresauts de la conjoncture économique. Au 31 décembre 2022, elle avait épuisé la totalité de ses fonds disponibles. « Bien avant l’épuisement de son capital, la Fondation Nestlé pour l’art a sollicité la société fondatrice [Nestlé] qui a répondu “Rien ne dure toujours” », explique Olivier Kaeser. Cet arrêt des activités a créé une onde de choc dans le monde de la culture en Suisse où, comme ailleurs en Europe, la crise du Covid a accentué des situations déjà compliquées pour la jeune création et les structures culturelles de petite et moyenne taille.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°614 du 23 juin 2023, avec le titre suivant : Clap de fin pour la Fondation Nestlé pour l’art en Suisse

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