Après la verrière, le décor peint de la Bourse de commerce de Paris, l’un des plus grands d’Europe, a fait l’objet d’un ambitieuse campagne de restauration afin d’en assurer la conservation et la lisibilité. Sans doute sensible à l’air du temps, la Chambre de commerce et d’industrie semble avoir tardé à prendre conscience de l’intérêt de son patrimoine.
PARIS - À l’occasion des Journées du Patrimoine ont été présentées au public les peintures murales restaurées de la Bourse de commerce. Achevée au printemps, cette opération faisait suite à la rénovation, en 1994-1995, de la spectaculaire coupole métallique conçue en 1813 par l’architecte François-Joseph Bélanger. Celle-ci avait été conservée lors de la reconstruction de la Bourse entre 1886 et 1889, époque à laquelle a été réalisé le décor peint qui épouse le schéma circulaire de la coupole. Quatre artistes aujourd’hui méconnus – Mazerolle, auteur du plafond de la Comédie-Française, Luminais, Laugée et Clairin – avaient brossé un vaste panorama célébrant le triomphe du commerce et de la technique occidentaux à travers le monde. Représentant dans une veine volontiers pittoresque les quatre parties du globe, les peintures, enfilant les poncifs sur les civilisations lointaines, exaltent l’apport incomparable de la technique occidentale sous la forme de trains ou d’usines et louent les bienfaits du commerce. Ce décor peint, pur produit de l’École des beaux-arts, rythmé par les allégories des points cardinaux dues au pinceau de Mazerolle, ne brille ni par sa beauté ni par son originalité. Mais encore fallait-il, pour porter ce jugement esthétique, que sa lisibilité soit rétablie grâce à une ambitieuse campagne de restauration. Victimes des méfaits de l’éclairage au gaz et du chauffage au charbon, les toiles marouflées s’étaient encrassées, devenant invisibles du sol. S’y étaient ajoutées des infiltrations venues de la verrière, auxquelles les travaux menés sous la direction d’Alain-Charles Perrot, architecte en chef des Monuments historiques, semblent avoir remédié. Sous l’action conjuguée de l’humidité et des variations thermiques, la couche picturale a subi des soulèvements de grande ampleur, qu’il a fallu consolider avant toute opération de nettoyage. “Sur la partie représentant la Russie et le Nord, plus des trois quarts de la couche picturale s’étaient soulevés”, explique François Bailly, dont l’entreprise a assuré, avec l’atelier BIS, la restauration de l’ensemble. Sachant que le décor peint couvre près de 1 500 m2, on mesure la difficulté de la tâche. La consolidation a été obtenue par application d’un voile à travers lequel a été étendue une résine acrylique mêlée d’eau. Après séchage, le voile a été retiré, enlevant ainsi une partie de la crasse, prélude au nettoyage proprement dit.
Variété des techniques picturales
L’épaisse couche de suie noire et grasse, qui s’était déposée, voire incrustée, a été ôtée grâce à l’emploi de tensioactifs dont la concentration varie en fonction de l’épaisseur de matière, puis de gommes. Une des difficultés auxquelles se sont heurtés les restaurateurs tient à la variété des techniques picturales employées par chaque artiste, l’un travaillant en empâtements, l’autre en aplats rapidement brossés.
Cette opération, d’un montant total de 9,42 millions de francs – 3,98 pour la verrière, 5,44 pour les peintures –, a été financée aux deux tiers par la Chambre de commerce et d’industrie de Paris (CCIP), propriétaire des lieux depuis 1949, le reste étant apporté par l’État. La CCIP se vantant de représenter des entreprises réalisant 18 % du produit intérieur brut, elle aurait pu depuis longtemps mettre en œuvre une telle opération. D’aucuns veulent voir, dans ce réveil tardif, l’effet d’une mode entretenue par le succès annuel des Journées du Patrimoine. Une mode qui devrait allègrement résister au temps.
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°68 du 9 octobre 1998, avec le titre suivant : Une valeur en hausse