Depuis plus de vingt ans, aucun office religieux n’a été célébré dans l’église Santa Maria della Pace et les Romains avaient fini par l’oublier. Il s’agit pourtant de l’un des chefs-d’œuvre du Baroque romain. Elle revit désormais grâce à une restauration financée par les fonds spéciaux du Jubilé.
ROME (de notre correspondante) - À l’instar de nombreuses églises romaines, Santa Maria della Pace, consacrée par Sixte IV lors de la guerre contre Ferrare, était restée sans façade. La construction de la fin du XVe siècle – un corps octogonal surmonté d’un dôme – était adossée au couvent dans lequel Donato Bramante devait peu de temps après ériger son cloître (1500-1504). Restée inachevée malgré l’intervention d’illustres architectes comme Maderno – qui en redessina la tribune –, l’église a été radicalement modifiée par l’architecte-peintre Pierre de Cortone. À la demande d’Alexandre VII, il en rénove la façade (1656-1657) et intervient à l’intérieur en rehaussant le toit dont il redécore la coupole. Avec sagesse, l’architecte toscan harmonise la façade non pas avec le corps de l’église mais avec l’étroite place, épargnée de constructions, au milieu d’un quartier très peuplé proche de la place Navone. Toutefois, la conception de ce chef-d’œuvre n’a pas été réalisée avec une expertise technique et des matériaux de construction adaptés. Comme l’explique l’architecte Francesco de Tomasso, surintendant adjoint des Biens architecturaux de Rome, “l’église a connu dès la fin du XVIIe siècle de sérieux problèmes structurels qui se sont ensuite aggravés au cours des deux siècles suivants. La construction des quais du Tibre, dans les années 1880, a aggravé considérablement les problèmes d’humidité en empêchant le débit régulier des eaux et a endommagé les ouvrages de maçonnerie à partir des fondations”.
Après l’assainissement des souterrains, la première consolidation a consisté en un renforcement du dôme avec des barres d’acier totalement invisibles. Même le revêtement en plomb a été complètement refait. Les restaurations les plus importantes ont eu lieu sur la façade qui était dans un état de dégradation avancée. Une enquête approfondie a révélé que la tripartition architecturale correspondait à des matériaux différents : le travertin a été utilisé pour le corps central tandis que les soubassements des ailes latérales sont en pierre et les parties hautes de la façade imitent la pierre avec de l’enduit peint. Dans les parties supérieures de la façade et dans les trompe-l’œil, les enduits étaient très dégradés. La surprise majeure a été de constater que la pierre de l’église provenait du stade de Domitien datant du Ier siècle, situé sous l’actuelle place Navone. La restauratrice Alessandra Pelliccioni, responsable du ravalement des façades, commente : “le problème le plus difficile à résoudre a été d’enlever les stucs anciens qui avaient taché en profondeur le travertin et laissé des auréoles jaunâtres. En outre, nous avons constaté que les blocs du revêtement avaient été assemblés de façon très approximative et que dans les parties hautes de la façade, on avait eu recours au stuc pour dissimuler les défauts d’origine. Le génie du projet de Cortone avait donc été compromis par une exécution négligée. Enlever les stucs anciens et répandus, absorber les taches et atténuer le manque d’homogénéité chromatique du revêtement en pierre a nécessité deux années de travail mais donné des résultats vraiment satisfaisants. À l’intérieur de l’église, la décoration en stuc de la coupole a été complètement restaurée mais il faut encore procéder aux opérations de rénovation des décorations des niches et du sol en marbres polychromes du XVIIe siècle.”
La restauration de l’église Santa Maria della Pace, financée en partie par des fonds spéciaux du Jubilé, s’intègre dans un projet d’ensemble qui englobe la place et le cloître de Bramante. Ce dernier accueille dorénavant des expositions d’art moderne et contemporain et les travaux qui y sont prévus, sont estimés à 1,5 milliard de lires (5 millions de francs).
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Une nouvelle beauté
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°111 du 22 septembre 2000, avec le titre suivant : Une nouvelle beauté