L’aile est de la Cité de la musique, œuvre de l’architecte Christian de Portzamparc, ouvre ses portes le 12 janvier. Elle abritera une salle de concert modulable de 800 à 1 200 places, mais également un musée dévolu à la musique. Plus qu’un musée instrumental, ce sera celui de l’histoire de la musique, grâce à une scénographie tout à fait contemporaine. Le directeur d’Orsay, Henri Loyrette, et l’architecte Franck Hammoutène se sont associés pour réaliser ce projet d’envergure.
PARIS - L’importance de notre patrimoine musical instrumental méritait un musée digne de ce nom. Autrefois logés au Conservatoire de la rue de Madrid, figés derrière des vitrines, les 4 500 instruments d’une collection débutée en 1795 sous la Convention et considérée comme la deuxième d’Europe après celle de Bruxelles, souffraient de locaux trop exigus et de conditions de conservation assez précaires.
Deux siècles plus tard, ils vont trouver un nouveau cadre à leur mesure au sein de la Cité de la musique : un espace de 2 800 m2 sur cinq niveaux, dont l’agencement intérieur a été confié à l’architecte Franck Hammoutène et la scénographie à Henri Loyrette, directeur du Musée d’Orsay. Souhaitant rompre avec la muséographie traditionnelle, ce dernier a imaginé de recréer des œuvres clés de la musique occidentale, de la Renaissance au XXe siècle, dans un décor inspiré du lieu de leur création, matérialisé par une maquette en coupe.
L’Orféo de Monteverdi au Palais ducal
Coiffé d’un casque à infrarouge qui diffusera des extraits de partitions, le visiteur pourra, au fil de son parcours, assister à l’Orféo de Claudio Monteverdi au palais ducal de Mantoue, suivre quelques mesures de l’Alceste de Lulli dans la cour de marbre de Versailles, à moins qu’il ne préfère un concert plus contemporain, tel l’Ex-Position de Mauricio Kagel, créé dans la salle de l’Ircam. Au total, dix orchestres seront ainsi reconstitués, qui permettront non seulement de suivre l’évolution des ensembles orchestraux mais également celle des salles de spectacles.
Cette démarche donne l’occasion à l’architecte Franck Hammoutène de développer un travail original. Habillages en bois chauds, enduits gris, lumière tamisée et indirecte grâce à l’utilisation de la fibre optique, une simple "feuille" de verre courant du sol au plafond en guise de vitrine, pour délimiter chaque ensemble orchestral et ne pas retenir "prisonniers" les instruments, eux-mêmes hissés sur des podiums en léger dénivelé sur la scène, tout est conçu pour mettre l’objet en valeur.
Priorité aux instruments
"La priorité est donnée aux instruments, affirme l’architecte, ils doivent habiter le musée, comme des œuvres vivantes. Avec Henri Loyrette, nous ne voulions surtout pas les enfermer dans des boîtes". Au total, le musée permanent montrera 800 instruments – luths, Stradivarius, clavecins de Ruckers-Taskin et Hemsch, trompettes et cors de Nuremberg, jusqu’au synthétiseur modulaire E-Mu de Frank Zappa, récemment acquis – auxquels s’ajouteront tableaux et sculptures inspirés par la musique, comme le portrait de Stravinsky par Jacques-Emile Blanche.
Le Musée de la musique montrera également sa collection d’instruments des musiques du monde. Il aura son espace d’expositions temporaires, son centre de documentation, son atelier de restauration, ses réserves ouvertes aux chercheurs, ses produits interactifs, et surtout un amphithéâtre de 230 places où l’on pourra entendre jouer des instruments de collection dans des conditions exceptionnelles.
Un musée de la musique, certes, mais aussi un musée de l’art de la musique, avec une politique d’achat axée sur le XXe siècle, ouvert à tous, au spécialiste comme au néophyte, à l’inconditionnel du "classique" comme à celui du contemporain.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Un musée pour l’histoire de la musique
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°10 du 1 janvier 1995, avec le titre suivant : Un musée pour l’histoire de la musique