Classé au patrimoine mondial de l’humanité, l’amphithéâtre d’Arles sera entièrement restauré d’ici dix ans. Estimé à 30 millions d’euros, ce chantier monumental s’inscrit dans un vaste plan de restauration concernant l’ensemble des monuments antiques de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
ARLES - Joyau de la “petite reine des Gaules”, l’amphithéâtre d’Arles est l’un des plus importants monuments que nous ait légués l’Antiquité romaine. Construite à la fin du Ier siècle au nord de la colonie d’Arelate, fondée par César en 46 av. J.-C., cette immense ellipse (136 mètres sur 107) dédiée aux jeux du cirque figure en effet parmi les plus grands amphithéâtres du monde romain. Vraisemblablement inspirée du Colisée à Rome, elle constitue en outre un témoin privilégié de cette civilisation en Narbonnaise, au même titre que les arènes de Nîmes ou d’autres monuments et sites gallo-romains. Les vicissitudes de l’histoire contribuèrent toutefois à lui donner une physionomie unique. Après la chute de l’Empire, l’édifice fut transformé en forteresse par la construction, sur le portique extérieur, de quatre hautes tours médiévales. Désireuse de se protéger des invasions barbares, toute la cité finit par y trouver refuge, métamorphosant l’amphithéâtre en ville fortifiée. Le monument ne retrouva son aspect originel qu’au XIXe siècle : de 1825 à 1830, la municipalité, sensible au “goût des ruines” si cher aux romantiques, se décida enfin à libérer l’édifice des deux cent douze maisons qui l’encombraient encore ! Classé monument historique en 1840 à l’initiative de Prosper Mérimée, il fit dès lors l’objet de campagnes de restauration ponctuelles. Gravement endommagé par certaines de ces interventions ainsi que par les agressions de l’environnement, son nettoyage et sa préservation s’imposaient. L’action combinée de l’eau et des sels contenus dans les précipitations a en effet provoqué la désagrégation progressive des pierres de l’amphithéâtre, qui ont aujourd’hui un aspect érodé. À ce phénomène s’ajoute l’altération causée par la pollution atmosphérique, à l’origine des dépôts noirâtres présents sur l’édifice.
Un chantier colossal
Rendu possible grâce au Plan pour le patrimoine antique de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (lire l’encadré), lancé en juillet 2001, ce chantier de restauration devrait durer dix ans et coûter trente millions d’euros. Il est financé par l’État (à 50 %), la Région (à 20 %), le département des Bouches-du-Rhône (à 25 %) et la Ville (à 5 %). Déjà, les premières pierres ont été nettoyées par microsablage, et celles qui étaient instables ou fracturées ont été consolidées ou, dans les cas les plus critiques, remplacées par des blocs similaires à ceux de l’époque antique. D’ici l’été 2004, sept des soixante travées devraient être restaurées. “La protection de l’édifice contre les eaux fluviales constitue l’un des problèmes majeurs du monument”, explique Alain-Charles Perrot, l’architecte en chef des Monuments historiques chargé du projet, dans la revue Monumental 2002. “Plutôt que d’envisager une structure lourde qui viendrait altérer le caractère de la ruine antique, de nouveaux gradins métalliques seront mis en place, dont la conception architecturale et technique en forme de lamelles superposées créera une protection des vestiges en faisant office de parapluie, précise-t-il. Le principe général de restauration que nous prévoyons consiste à conserver intacte et à ‘cristalliser’ la ruine dans son état actuel, en respectant les divers types de restaurations menées au cours des siècles passés”, poursuit l’architecte. Son projet comprend toutefois la restitution d’un promenoir extérieur, “afin de redonner au monument ses dispositions architecturales d’origine”.
Au terme de ce chantier, la piste de l’arène (une structure en bois) retrouvera en outre son altimétrie antique, soit un niveau d’environ 2,40 mètres plus haut que l’actuel. Ces travaux ne devraient interrompre ni les visites (300 000 visiteurs payants en 2000 !), ni la saison taurine, programmée d’avril à septembre.
Lancé officiellement le 17 juillet 2001 à Arles par la signature d’un protocole de décentralisation culturelle instaurant un nouveau partage de responsabilités entre l’État et le conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur, le Plan patrimoine antique est un vaste programme de restauration et de mise en valeur des monuments antiques de la région PACA. Outre les arènes d’Arles, sont notamment concernés le théâtre antique et l’arc de triomphe d’Orange, l’amphithéâtre de Fréjus, la crypte de la cathédrale Notre-Dame-du-Bourg à Digne-les-Bains, l’abbaye de Saint-Victor à Marseille, l’arc de triomphe et le mausolée de Saint-Rémy-de-Provence, les arènes de Cimiez à Nice et le site de Vaison-la-Romaine. L’enveloppe globale du projet s’élève à plus de 100 millions d’euros, dont la moitié est financée par l’État, 20 % par la Région, 25 % par les conseils généraux et 5 % par les villes propriétaires des monuments.
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Travaux d’Hercule à Arles
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Abonnez-vous dès 1 €Monumental, revue scientifique et technique des monuments historiques, annuel 2002, éd. du Patrimoine, 39 euros ; le guide d’Arles, éd. du Patrimoine, 12 euros ; Stéphanie Delarue, Conservation et restauration de l’amphithéâtre d’Arles, monographie de l’École du Louvre, mars 2000, (www.stephdelarue.chez.tiscali.fr).
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°170 du 2 mai 2003, avec le titre suivant : Travaux d’Hercule à Arles