La restauration d’un cycle de fresques découvert en 1995 au château de Voghera, dans la province de Pavie, a permis de l’attribuer de façon quasi certaine au plus célèbre des élèves de Bramante, Bramantino.
VOGHERA. En 1992, la surintendance à l’Environnement et à l’Architecture s’est décidée à éliminer toute trace de l’établissement pénitentiaire qui était installé au château de Voghera jusqu’au début des années quatre-vingt, puis à refaire la toiture et à dégager les plafonds à caissons d’origine. Ainsi que l’a rapporté l’architecte Giusi Vago, l’enlèvement du faux plafond d’une salle de l’aile Est a alors permis de mettre au jour des fresques du XVIe siècle, dont personne ne soupçonnait l’existence : "Les premières traces nous sont apparues il y a deux ans. Nous avons immédiatement commencé à enlever le badigeon qui les recouvrait, et cette opération s’est achevée l’année dernière." Dès l’origine, les spécialistes avaient pris conscience de l’importance de la découverte, mais le cycle nettoyé n’a été présenté que très récemment à divers responsables de la surintendance de Brera, dont Teresa Binaghi. Quatre historiens de l’art de la surintendance aux Biens artistiques, et notamment Pietro Petraroia, ont identifié à l’unanimité l’auteur des fresques comme étant le peintre Bartolomeo Suardi, dit Bramantino (v. 1465-v. 1530).
Arrêt des travaux
De ce peintre notable de la Renaissance lombarde, seules quelques rares œuvres sont conservées à Milan : les cartons des tapisseries des Mois de la chapelle de la famille Trivulzio, aujourd’hui au château des Sforza, la fresque d’Argus, peinte sur un mur de ce même château, une Nativité à l’attribution contestée par certains historiens mais qui est visible au couvent de Santa Maria delle Grazie, et quelques fresques dispersées (Pinacothèques Ambrosiana et de Brera). Cette découverte est d’autant plus intéressante qu’il s’agit d’un décor insolite dans un tel contexte. Deux des neuf muses réparties sur les quatre murs de la salle sont presque intactes : Uranie, muse de l’astronomie, et Erato, muse de la poésie érotique. En dépit de l’état fragmentaire du cycle, chacun est frappé par la qualité de l’exécution et l’extraordinaire richesse du chromatisme. Ainsi que le remarque Teresa Binaghi : "Je n’ai pas encore eu le temps d’entreprendre des recherches assez poussées pour en obtenir la confirmation, mais il semble bien exister une étroite affinité stylistique entre ces fresques, les tapisseries Trivulzio et la Madone conservée à la Brera. D’autre part, selon les premières enquêtes effectuées sur l’histoire du château de Voghera, la commande des fresques aurait pu être passée entre 1505 et 1525, durant une période où deux princes – Galeazzo San Severino, époux de Bianca, la fille naturelle de Ludovic Sforza, dit le More, et Louis de Luxembourg-Ligny – ont été tour à tour propriétaires du château. Cette datation paraît d’autant plus vraisemblable que l’on se trouve là en présence d’un milieu sensible à l’influence française et auquel appartenaient les commanditaires les plus renommés de Bramantino." La découverte a momentanément entraîné l’arrêt des travaux de rénovation du château de Voghera. Le coût de ces interventions – 600 millions de lires (20 millions de francs) – a été couvert par le ministère des Biens culturels et par l’Inspection des travaux publics, mais "avant de procéder à d’autres opérations, il importe de décider à quel usage nous allons désormais destiner ce monument", indique Teresa Binaghi.
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°41 du 4 juillet 1997, avec le titre suivant : Signées Bramantino