La cathédrale gothique de Gijón, en Espagne, s’offre un vitrail réalisé par le peintre abstrait Sean Scully.
GIJÓN - Avec le travail du peintre abstrait américain Sean Scully (né à Dublin en 1945), l’art contemporain va faire son entrée dans la cathédrale de Gijón, en Espagne. Exemple unique dans l’histoire de l’architecture gothique, la cathédrale est célèbre pour son immense nef, haute de 23 mètres, soit 2 mètres de moins que celle de Saint-Pierre de Rome, la plus haute au monde.
Scully va y réaliser un vitrail de 11 mètres sur 3, occasionnant ainsi le percement de la façade nord, dont l’ouverture était murée depuis 1500. « Ce sera une œuvre spirituelle, mais avec un profond sentiment de joie, avec des couleurs vives qui laisseront la lumière pénétrer à l’intérieur, l’inondant. Je veux transmettre une sensation à la fois de liberté et d’intégration », affirme l’artiste. Cette intervention sur la façade nord, dotée d’un budget de 2,1 millions d’euros, s’inscrit dans le projet de restauration complète du lieu de culte. Celui-ci fait lui-même partie du « plan des cathédrales », un programme de restauration des principales cathédrales de la péninsule Ibérique mené par le ministère espagnol de la Culture.
Scully a été choisi par un comité d’experts formé de Tomàs Llorens, Joaquim Garriga, Mauro Natale, Armin Zweite, Victòria Combalia et Narcís Comadira. Le succès de l’intervention de Miquel Barceló sur la chapelle Saint-Pierre de la cathédrale de Palma de Majorque a sans doute joué en faveur de Scully. Chez l’artiste américain d’origine irlandaise, l’influence de l’art sacré et des maîtres anciens – ainsi Masaccio – donne vie à des compositions géométriques peintes et à des photographies où les bâtisses en pierres provenant de la campagne irlandaise sont chargées de symbolisme mystique et d’échos aux cultes anciens. « Dans le monde actuel, il est difficile de continuer à représenter la Bible sur un mode figuratif. L’Église se doit d’évoluer et de réunir des gens d’horizons divers, et, pour se faire, elle doit créer de nouveaux espaces spirituels, libres et accueillants. L’art abstrait propose un rythme, mais ne raconte pas d’histoires préétablies et donne une liberté pour percevoir et expérimenter la lumière », explique Scully. L’artiste, qui maîtrise parfaitement l’espagnol, a eu le temps d’approfondir ses connaissances du patrimoine artistique et architectural espagnol lorsqu’il résidait dans sa maison-atelier de Barcelone. La Fondation Miró lui a consacré une rétrospective en 2007, et la galerie Carles Taché (Barcelone), où il expose régulièrement, vient de présenter une sélection de ses derniers tableaux et œuvres sur papier. « J’ai travaillé environ six mois sur le projet de Gijón, et aujourd’hui il est défini jusque dans ses moindres détails. Au début, j’ai essayé diverses options avec l’aquarelle, parce que je voulais respecter la tradition, mais en fin de compte j’ai travaillé sur ordinateur. C’est moins romantique, mais plus rapide et plus précis », raconte l’artiste. Scully a choisi une œuvre de jeunesse comme point de départ, à l’époque où il utilisait des couleurs brillantes et vives, lesquelles ont, avec le temps, laissé place à la gamme plus sourde évoquant son Irlande natale. « Les couleurs mélancoliques fonctionnent bien sur la toile, mais elles n’ont pas leur place dans une église. J’ai choisi des tons gais, avec une préférence pour les bleus et les jaunes, car ils me rappellent le Moyen Âge et créent un dialogue avec les autres vitraux », précise-t-il. L’artiste a trouvé un maître verrier capable de concrétiser ses idées à l’aide de techniques traditionnelles et pigments naturels. Les travaux viennent de débuter.
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Sean Scully en majesté
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°297 du 20 février 2009, avec le titre suivant : Sean Scully en majesté