MOSCOU (RUSSIE) [17.03.16] - Une rocambolesque affaire de détournements de fonds sème la pagaille au ministère de la Culture et éclabousse jusqu’au ministre Vladimir Medinski. Réagissant mardi à l’arrestation de son adjoint Grigori Piroumov, le ministre a déclaré « c’est un véritable choc pour nous tous ».
Les travaux de restauration de célèbres bâtiments du patrimoine culturel russe ont apparemment été bâclés, entraînant parfois de graves dégâts. Il s’agit du couvent de Novodievitchi à Moscou, de la forteresse d’Izborsk, dans le Nord de la Russie, du Mausolée de Lénine et de la résidence personnelle du président russe.
L’estimation basse des sommes détournées, selon les enquêteurs est de 60 millions de roubles (770 000 euros) dans le cas de la restauration de la forteresse d’Izborsk. L’affaire est qualifiée de « crime grave » et l’accusé principal, Grigori Piroumov, risque jusqu’à 10 ans de prison. Qualifié de « cerveau de la fraude », il est placé en détention préventive, car la police estime qu’il risque d’exercer des pressions sur les témoins. Les enquêteurs disent n’avoir pas mis la main sur la somme dérobée.
Grigori Piroumov se dit innocent, dément avoir les moyens de faire pression sur les témoins et dit bénéficier d’une excellente réputation au ministère, s’appuyant sur une lettre élogieuse signée par le ministre de la culture Vladimir Medinsky.
Des agents du FSB (sécurité d’Etat, ex-KGB) ont interpellé Piroumov dans le cadre d’une enquête criminelle concernant un groupe d’entrepreneurs et de dirigeants du ministère de la culture, soupçonnés d’association de malfaiteur et de détournements de fonds publics destinés à la restauration de bâtiments du patrimoine culturel russe. Le lieu le plus célèbre est le couvent de Novodievitchi (couvent de la nouvelle vierge), dans le centre de Moscou. Fondé en 1524, le couvent est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le 15 mars 2015, un incendie sur le chantier de restauration du clocher a provoqué une vive polémique, certains commentateurs subodorant un incendie criminel dans l’intention de masquer une restauration bâclée, faute de moyens, parce que l’argent a été détourné en amont. Une pratique qui n’a rien d’exceptionnel.
Dans le cadre de la même affaire, le dirigeant de l’entreprise BaltStroï a été interpellé. Cette société a la particularité d’avoir raflé pas moins de 248 appels d’offres de l’Etat russe pour une somme totale de 70 milliards de roubles (1 milliard d’euros). Ce qui fleure bon le clientélisme. Bon nombre des appels d’offres ont été émis par le ministère de la Culture, pour la restauration du Théâtre du Bolchoï et des conservatoires de Moscou et de Saint-Pétersbourg. Ainsi que le couvent de Novodievitchi, dont le contrat s’élève à 2 millions d’euros.
Les racines du scandale remontent à 2011, lorsque des experts, associés à un député d’opposition de la région de Pskov décident d’alerter les pouvoirs publics sur la qualité exécrable des travaux de restauration de la forteresse d’Izborsk, dont les fondations remontent au 7e siècle. Des requêtes répétées auprès de la police, qui a attendu 2013 avant d’ouvrir une enquête. La lenteur extrême de la progression de l’enquête a été interprétée par les observateurs comme un signe que les malfaiteurs disposaient d’appuis au plus haut niveau.
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Restauration sabotée et détournement de fonds au ministère de la culture russe
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Abonnez-vous dès 1 €Le couvent de Novodievitchi à Moscou, Russie, l'un des bâtiments dont la restauration est soupçonnée d'avoir été bâclée © Photo Anne-Laure Peretti - 2007 - Licence CC BY-SA 3.0