On commande souvent aux architectes des « musées-icônes ». Mais les critiques dénoncent leur incapacité à mettre en valeur les œuvres d’art. Quel est votre avis sur le débat « art contre architecture » ?
Je considère l’architecture comme de l’art, bien entendu. […] C’est un art d’expression. Aussi, une manière de créer l’architecture est de donner de la force à l’aspect fonctionnel. [On peut aussi] privilégier l’émotion et la poésie. La différence est très subtile. Prenez la Menil Foundation [à Houston]. Ce n’est pas un espace que l’on peut qualifier de neutre. La célèbre théorie sur l’espace neutre qui empêcherait l’architecture d’être en compétition avec les œuvres est stupide. […] Le Kimbell Art Museum à Fort Worth au Texas était peut-être [le premier] musée où j’ai ressenti l’idée de l’émotion. La lumière naturelle n’est pas réellement destinée à éclairer les tableaux, mais elle est très émotionnelle. […] Si vous ne voulez pas être en compétition avec l’art, mais que vous voulez toujours donner de la personnalité au musée, vous devez travailler sur l’immatérialité de la lumière du bâtiment, sur sa vibration et ses proportions.
Qu’en est-il du « white cube » comme espace idéal pour accueillir des œuvres d’art ?
Je ne pense pas que ce concept soit bon. Nous travaillons actuellement sur le Musée Paul-Klee à Berne […]. Le musée existant en centre-ville peut être qualifié de « white box ». La théorie veut que, s’il s’agit d’une « boîte blanche », alors Paul Klee est en sécurité. Mais lorsque vous êtes sur place, vous réalisez que cette boîte est capable de tuer Klee, car elle est trop neutre, elle est morte. Elle ne donne aucune lumière. Elle tue l’art.
Prenez-vous en considération pour vos projets les collections qui seront exposées dans le musée ?
Bien entendu, c’est notre point de départ. La première chose que j’ai faite lorsque je travaillais sur la Menil Foundation est d’aller regarder chacune des œuvres. Lorsque nous avons travaillé sur le petit pavillon adjacent, Cy Twombly est venu à mon bureau et nous avons travaillé ensemble. Avec Ernst Beyeler à Bâle, nous avons immédiatement réalisé des maquettes à l’échelle de 1/10 des 125 œuvres de la collection.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Renzo Piano
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°197 du 8 juillet 2004, avec le titre suivant : Renzo Piano