Les célébrations des 250 ans de la découverte de Pompéi se sont conclues par un colloque international au Musée archéologique de Naples, du 25 au 27 novembre dernier. Des spécialistes du monde entier étaient présents, parmi lesquels Michele Cordaro, directeur de l’Institut central de restauration de Rome, dont nous rapportons l’intervention.
Il est difficile de déterminer une action efficace pour la conservation et l’entretien de l’ensemble du site de Pompéi, non seulement en raison de son étendue, mais surtout de son caractère atypique comparé à n’importe quelle autre zone archéologique du monde. En effet, Pompéi ne conserve pas seulement le squelette des structures antiques, les traces de l’implantation urbaine ou un amoncellement d’édifices plus ou moins réduits à l’état de ruines, plus ou moins complets et identifiés. Pompéi présente encore, pour une large part, l’ampleur de l’architecture d’origine ainsi que l’ensemble de ses décors. Mais le site est si vaste et important, et en même temps si fragile, que la possibilité d’une sauvegarde complète de ce trésor se révèle particulièrement délicate.
[...] Quelle peut être la stratégie adéquate pour définir concrètement les interventions utiles à la préservation de ce patrimoine ? Le champ est très vaste et s’étend du simple contrôle de l’entretien aux opérations de conservation et à la restauration pure et simple. La réalité de Pompéi est celle d’une véritable ville, et je pense qu’il faut considérer sa dimension urbaine comme unique critère pour une définition détaillée des interventions ponctuelles. Par exemple, un des problèmes majeurs de Pompéi est l’humidité. De nombreux murs sont imbibés d’humidité et délavés par la pluie ; le système d’écoulement des eaux de pluie protège certaines zones, mais il n’existe aucun lieu de déversement final. Cherchons à établir une stratégie utile : il serait important de définir une cartographie de base de la ville entière, précisant non seulement ce qui se voit mais aussi ce qui est au-dessous, c’est-à-dire la structure géologique de la zone des fondations et les stratifications qui peuvent être saisies et définies d’après le réseau de routes actuel de Pompéi.
Une dégradation exponentielle
[...] C’est un travail de grande envergure, impliquant toute une série de recherches, de sondages et de définitions qui ne peuvent pas être faites au lance-pierres. Cette cartographie permettrait, à l’occasion d’autres interventions ou de fouilles, de se rapporter à un système, évidemment informatisé, reconstruisant élément par élément le schéma cohérent de l’écoulement des eaux de pluie.
L’autre problème aigu concerne l’utilisation de Pompéi : n’importe quelle ville abandonnée, qui n’est plus habitée ni utilisée, est sujette à une dégradation exponentielle et à un déclin progressif. D’autre part, la présence touristique est si importante qu’elle représente un risque pour le site. Deux facteurs de dégradation de nature opposée se retrouvent ainsi réunis. Celui de l’exploitation touristique du site est assurément à considérer avec beaucoup d’attention, et je crois que les choix faits ces dernières années par la Surintendance de Pompéi vont dans la bonne direction. Cette orientation consiste, grâce à une alternance des parcours, à donner au visiteur la possibilité d’avoir une vue plus complète du site tout en désengorgeant les lieux les plus prisés.
La recherche de rapports nouveaux avec le secteur privé, rendus possibles par la récente autonomie de gestion, exige que la participation du secteur public se renforce elle aussi. Il est évident que la conservation de Pompéi ne peut être totalement financée par les ressources économiques de la Surintendance, elle implique également la participation des collectivités territoriales, par exemple.
[...] Il faut mettre en place un centre d’élaboration de données qui définisse les indications nécessaires à la réalisation des travaux et établisse le cahier des charges pour la restauration, l’entretien et la conservation du site. Ce qui est nécessaire, c’est une sorte de “carte des risques” de Pompéi, prenant en compte la composition et l’état de conservation des pièces, des superficies et des structures, et détaillant en même temps au cas par cas les facteurs émergents de risques qui aggravent les dégâts.
Une étude approfondie de la cartographie de base et de sa réalisation est donc indispensable et donnera aussi la possibilité de détailler la composition du sous-sol. Cette exigence est d’autant plus fondamentale que cette description de l’ensemble de la cité de Pompéi détermine l’aspect actuel et l’état de conservation du site. [...]
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Pour une carte des risques
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°76 du 5 février 1999, avec le titre suivant : Pour une carte des risques