En avril, la Galerie Guttklein Fine Art (Paris) annonçait l’acquisition par le MoMA du tableau de Hervé Télémaque, No Title (The Ugly American), grâce au mécénat de Marie-Josée et Henry Kravis en l’honneur de Jerry Speyer, trois personnalités proches du musée new-yorkais.
Télémaque - Né à Port-au-Prince en 1937, Hervé Télémaque étudie trois ans à l’Art Students League de New York, avant de s’installer à Paris où il vit et travaille depuis 1961. Sur place, il prend ses distances avec le surréalisme pour prendre part à l’aventure pop de la figuration narrative tout en se distinguant par un vocabulaire plastique très personnel hérité de ses origines haïtiennes.
Politique - Pour Sébastien Simon Petibon, directeur de la Galerie Guttklein, le choix du MoMA s’est porté sur cette acquisition pour deux raisons, l’une spécifique au tableau, l’autre plus conjoncturelle. La première est contenue dans la symbolique politique de l’œuvre, qui est une critique ouverte de la société ségrégationniste et capitaliste américaine. En haut à gauche, les figures tutélaires de Toussaint Louverture et de Fidel Castro incarnent l’esprit contestataire de Télémaque, qui quitte les États-Unis en 1961 car il souffre du racisme ambiant. La seconde raison qui préside à cette acquisition n’est pas étrangère à la frénésie actuelle du marché de l’art pour l’art afro-américain, suivie par les musées étasuniens qui enchaînent les expositions sur ce thème.
Prophétique - En haut à droite, le visage écarlate aux cheveux blonds n’évoque-t-il pas celui de l’actuel président des États-Unis ? Une ressemblance, aussi fortuite que prophétique, qui n’a pas échappé au MoMA. Une semaine après le décret du 27 janvier 2017 interdisant la délivrance de visa aux ressortissants de pays musulmans, le musée protestait contre cette initiative de Donald Trump en exposant des œuvres d’artistes soudanais, irakiens et iraniens.
1962-1964 - D’après Télémaque, No Title (The Ugly American) est l’une des « six œuvres majeures de facture pop » qu’il aurait peintes en 1963. D’après les dates au revers de la toile, il l’aurait retouchée jusqu’en 1964, année charnière où le peintre participe à la Documenta 3 de Cassel, puis organise avec Bernard Rancillac l’exposition « Mythologies quotidiennes ». Celle-ci rassemble pour la première fois au Musée d’art moderne de la Ville de Paris un groupe de peintres figuratifs parisiens (dont Arroyo, Monory, Voss, Buri et Klasen) que le critique d’art Gérald Gassiot-Talabot baptise à cette occasion de Figuration narrative.
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No Title de Télémaque
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°715 du 1 septembre 2018, avec le titre suivant : No Title de Télémaque