Mossoul est-elle encore une ville multiculturelle ?

La propagande a profondément divisé la société, l’EI cherchant toujours à exacerber les conflits intercommunautaires. Pour tenter de reconstruire une société multiculturelle, l’Unesco et ses partenaires ont recours à la notion de « résilience », un terme qui pour l’instant ne produit rien. Il y a pourtant « un véritable enjeu pour la société civile [à] retrouver sa forme d’origine et [à] pouvoir encaisser les chocs et les crises » liés au terrorisme, affirme Nicolas Hénin. Selon le spécialiste du Moyen-Orient, il ne faut pas s’arrêter au mot, largement galvaudé : « “résilience” est devenu un mot fourre-tout qui déclenche un réflexe chez les donateurs internationaux dans ce type d’organisation, mais derrière il y a des actions concrètes ». L’Unesco envisage par exemple de mettre en place à Mossoul des comités de quartier, et s’attelle à restaurer des lieux de culte dans la vieille ville. Mais pour Nicolas Hénin, l’enjeu est de « recréer de la cohésion au sein même de la communauté arabe sunnite car son attitude face à l’EI a varié de la passivité à l’adhésion pure et simple ». Bien que l’Unesco peine à l’admettre, certains sunnites ont en effet participé aux destructions du patrimoine dans la région de Mossoul, mais aussi aux exactions contre les yazidis et les chrétiens. Il n’est donc pas étonnant que peu de chrétiens ou de yazidis soient rentrés à Mossoul depuis sa libération. D’après l’archéologue Faisal Jeber, sur les 50 000 chrétiens que recensait Mossoul avant 2014, « très peu de familles sont revenues, peut être une dizaine à ce jour ». Il regrette que le rétablissement de la cohésion sociale « ne soit pas la priorité du gouvernement». Pour restaurer une société multiculturelle, il faut un peu plus que des lieux de culte Rénovés.