BERLIN / ALLEMAGNE
Dépité par les retards accumulés sur le chantier du Château de Berlin, son maître d’œuvre démissionne en fustigeant le manque de rigueur de la ministre de la Culture.
BERLIN - Le coprésident et porte-parole de la Fondation du Château de Berlin, Manfred Rettig, quittera son poste le 1er mars prochain. Depuis 2009, il était maître d’œuvre de la reconstruction du Château, actuellement le plus ambitieux projet de politique culturelle allemand, doté d’un budget de 590 millions d’euros. Le futur Château hébergera un centre culturel, le Humboldt Forum. Ses trois principaux occupants seront les musées étatiques de Berlin, l’université Humboldt et le Land de Berlin.
Manfred Rettig est l’artisan du projet titanesque et réussi du déménagement du gouvernement fédéral de Bonn à Berlin, après le changement de capitale suite à la réunification allemande. Il claque la porte de la Fondation du Château de Berlin avec éclat. Il l’avait toujours affirmé, il quitterait son poste si le chantier risquait de ne pas respecter les coûts et les délais. On peut tout mettre en œuvre pour réussir un projet de construction, a-t-il déclaré dans une interview au Tagesspiegel, « mais si la discipline des maîtres d’ouvrage n’est pas au rendez-vous, un tel projet va droit dans le mur ». Selon lui, 80 % des retards et surcoûts des grands projets de construction (rénovation de l’Opéra Staatsoper, la Philharmonie de l’Elbe, le grand aéroport de Berlin) sont dus à des changements de dernière minute par les commanditaires.
Alors que l’achèvement du gros œuvre a été célébré en grande pompe en juin dernier, le concept d’ensemble du Humboldt Forum n’est toujours pas défini. « On ne commence la construction [d’un bâtiment] que lorsqu’on sait exactement ce que l’on veut construire », déclare-t-il.
Une gouvernance complexe
La ministre de la Culture, Monika Grütters a nommé Neil MacGregor, l’ancien Directeur du British Museum, responsable d’une Direction fondatrice du Humboldt Forum, aux côtés d’Hermann Parzinger (Fondation du Patrimoine culturel de Prusse) et Horst Bredekamp (Université Humboldt). Manfred Rettig salue le choix de Neil MacGregor, qui pourra faire du Château un projet non élitiste et accessible au « citoyen lambda », une priorité pour Rettig. Mais il précise que celui-ci arrive trop tard. Il réagit également au blanc-seing accordé par la ministre de la Culture Monika Grütters à Neil MacGregor, qui pourra opérer les modifications qu’il souhaite au projet. Il juge ces déclarations « irréalistes » : la structure du Château est déjà achevée. Manfred Rettig critique également le changement du projet du Land de Berlin, une exposition intitulée « Ville Monde. Berlin », au lieu d’une exposition sur le monde des langues, et l’arrivée tardive du curateur du projet, Paul Spies, (1er février 2016). Si les laboratoires de langue initialement prévus peuvent être reconvertis en espace d’exposition, les salles ne disposent pas du système de ventilation requis pour exposer des artefacts originaux.
Pour compliquer encore un peu la chaîne de responsabilités, la Fondation du Château de Berlin crée une filiale qui gérera la programmation culturelle du Humboldt-Forum. Neil MacGregor ayant refusé d’en prendre la direction, le nouveau directeur devra mettre en œuvre un concept élaboré par d’autres, par la Direction fondatrice. Ce qui laisse présager de nouvelles tensions entre les différents protagonistes.
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Manfred Rettig jette l’éponge
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°450 du 5 février 2016, avec le titre suivant : Manfred Rettig jette l’éponge