Dans le cadre du Sime, Georg Baselitz dévoile pour la première fois sa collection d’art africain. L’expert et ancien marchand, Jacques Kerchache, a sélectionné 34 sculptures provenant pour la plupart du Congo, du Zaïre et d’Afrique de l’Est. Grandes statues funéraires et fétiches révèlent le goût de l’artiste pour le monumental et le magique.
Baselitz se passionne pour l’art africain depuis le début des années 70. C’est au contact d’un fétiche du Zaïre qu’il éprouve une certaine familiarité avec la sculpture : "Il transmettait une culture, une histoire qui, en fin de compte, ne m’était pas si étrangère que cela." Les œuvres qu’il collectionne deviennent sa principale source d’inspiration en tant que sculpteur. "Ce que j’ai recherché dans l’art africain, c’était plutôt l’origine des formes, de la sculpture", reconnaît l’artiste allemand. Monumentalité et matière brute le fascinent également, à tel point que ses propres sculptures
– simples ébauches où le bois nu est travaillé de manière directe et violente – ont choqué par leur "archaïsme". Quête perpétuelle du primitif ?
Rien de traditionnel
La collection de Baselitz ne montre pourtant rien de "traditionnel" dans les statues monumentales et insolites, ni d’"artisanal" dans les œuvres aussi diverses que des sculptures funéraires en bois, des fétiches ou encore des figures reliquaires en tissu. Tel est le cas des poteaux sculptés commémoratifs des Giryama (Kenya) : petites têtes perchées sur des corps simplifiés à l’extrême, à l’origine plantés sur les tombeaux des ancêtres, ils surprennent par leur élongation.
Les étonnants fétiches Teke, visages scarifiés et barbe en trapèze, exhibent leur cavité abdominale qui contenait autrefois une substance magique. Tout comme le fétiche à clous (Vili), on les utilisait lors de cérémonies rituelles. La série des personnages en tissu (muziri) du début du siècle, se distingue par sa rareté. Seul le Museum Lafaille de La Rochelle en possède un exemplaire. Ces mannequins reliquaires des Beembe du Congo, fabriqués avec des étoffes peintes, renfermaient les ossements des chefs, déterrés à l’occasion de secondes funérailles. Cet art coloré, en mouvement, presque anecdotique, contraste avec le hiératisme des sculptures Ibo du Nigéria. Dans une stricte frontalité, elles sont toujours représentées debout les mains tendues, paumes vers l’extérieur. Autres statues monumentales et très différentes par leur style, une grande "figure-tronc" Bwaka quasi abstraite voisine avec un rare Lengola (Zaïre) aux bras articulés. Quant aux longs poteaux Bochio du Bénin et Konso d’Éthiopie, ils impressionnent par leur bois rongé, brut et sans artifice.
"La collection d’art africain de Baselitz", Sime 1994, Paris, Champ de Mars, du 10 au 17 avril 1994. Un entretien de Georg Baselitz avec Jacques Kerchache sera publié par le Sime dans le catalogue.
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Les fétiches de Baselitz
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°2 du 1 avril 1994, avec le titre suivant : Les fétiches de Baselitz