Leipzig en Saxe, ancienne capitale de l’industrie du Livre, est aujourd’hui un immense chantier de restauration monumentale. L’ouvrage, Leipzig. Den Wandel zeigen, montre l’importance des travaux faits et la rapidité avec laquelle ils sont conduits.
LEIPZIG - Dans l’ancienne Europe de l’Est, contrairement à la France où le Parti communiste se montre volontiers un ardent défenseur du patrimoine, les régimes totalitaires étaient opposés à la conservation de l’architecture ancienne. Pour quelques exemples de protection et de mise en valeur, généralement conduites à des fins nationalistes – les places de Prague et de Varsovie, les palais russes, l’Opéra de Dresde –, ou idéologiques – le sauvetage du patrimoine industriel – ces régimes mettaient en application la théorie marxiste-léniniste des “deux cultures” : la culture bourgeoise, décadente, était appelée à disparaître, la culture prolétarienne à s’implanter. On en connaît les résultats à Bucarest, à Bratislava, à Dresde : centre des cités dévasté, périphéries surdensifiées de “cages à lapins”. Leipzig a été la victime de la même démarche : la destruction en mai 1968 de la Paulinerkirche, sur Karl-Marx-Platz, ancienne l’église de l’Université, rescapée des bombardements de 1943, en est l’exemple symbolique ; elle provoqua une émotion internationale, surtout dans les pays anglo-saxons.
Un grand chantier pour l’architecture du XIXe siècle
Partout encore, on rencontre des immeubles de la fin du XIXe siècle à demi ruinés ou des terrains vagues tenant lieu de parkings sauvages : le bombardement américain de 1943, le refus de reconstruire le centre, l’absence totale d’entretien dont ont été victimes les habitations et les édifices accueillant les pouvoirs publics, en sont la cause. Mais les destructions sont moindres qu’à Dresde : la trame urbaine subsiste. Aujourd’hui, malgré une perte de population de près de 100 000 habitants, Leipzig s’active fébrilement à construire, reconstruire, restaurer.
Un livre vient de paraître, à l’occasion de l’Exposition universelle de Hanovre, entièrement consacré aux transformations de la ville (Leipzig. Den Wandel zeigen, de Niels Gormsen et d’Armin Kühne, édition Leipzig). Il illustre l’importance des travaux faits et la rapidité avec laquelle ils sont conduits. Notons au passage la reconstruction de façades 1900 : Hainstraße au Barthel Hof, ou Dittrichring/Ecke Barfußgasse, ou encore dans Paulaner Klostergasse, la restauration intérieure de Saint-Nicolas et les travaux extérieurs de Saint-Thomas, l’église de Bach. Et surtout la remise en valeur de grands bâtiments publics de style historiciste : le portique de la gare de Bavière, le neue Rathaus, l’Albertina, bibliothèque universitaire et l’immense bâtiment du Bundesverwaltungsgericht qui fait l’objet d’un chantier gigantesque.
Ici, la pierre est remplacée par de la pierre : pas de mortier ou de pâte à modeler comme aux façades du Louvre ; les ouvrages de plomberie refaits à l’identique, les gouttières en cuivre, le tout dans les règles de l’art. Et sans lésiner : on travaille manifestement pour la durée. Fin octobre, la grande halle en métal et verre de la Foire de Leipzig a accueilli Denkmal 2000, Europäische Messe für Denkmalpflege und Stadterneuerung, manifestation européenne pour la restauration monumentale et la réhabilitation urbaine. À cette occasion, l’administration municipale a publié une nouvelle édition mise à jour de son livre : Denkmalschutz und Denkmalpflege in Leipzig. Il est clair que l’Allemagne en général et Leipzig en particulier tiennent désormais la palme pour ce qui est du patrimoine. À cette manifestation étaient représentés l’Autriche, la Pologne, la Russie et la Slovaquie, mais pas la France. Malgré les appels à la concurrence internationale, on ne rencontre encore dans la ville ni entreprises ni architectes français.
À Leipzig, la sauvegarde des monuments est assurée par la loi du 3 mars 1993, valable pour l’ensemble de l’État libre (Freistaat) de Saxe. Elle s’exerce sous le contrôle de l’administration du Land, localisée en deux niveaux hiérarchiques à Dresde et à Leipzig et sous le contrôle de deux ministères : l’Intérieur pour la protection, les Sciences et les Arts pour la conservation. Les responsabilités municipales sont assurées au Rathaus de Leipzig par une administration municipale et quatre conservations d’arrondissement. Les autorisations de travaux ne sont pas assorties d’une possibilité explicite de subvention et n’obligent pas à contracter avec un architecte particulier, l’administration se contente de publier la liste des ingénieurs, architectes, bureaux de programmation et entreprises jouissant de références convenables. Ces dispositions ne s’appliquent pas de droit aux édifices du culte ; elles supposent, si nécessaire, une concertation.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Leipzig retrouve son passé
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°115 du 17 novembre 2000, avec le titre suivant : Leipzig retrouve son passé