PARIS
De « la guerre des colles » à la « perruque » ou l'utilisation à des fins privées des outils publics, rien ne va plus au Mobilier national, une institution chargée de l'ameublement des résidences présidentielles à « bout de souffle », selon la Cour des comptes.
Collections mal entretenues, gestion "sclérosée" du personnel, restaurations ratées, la Cour critique avec virulence le MNGBS (Le Mobilier national et les Manufactures nationales des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie) chargé également de la création d'œuvres contemporaines et de la valorisation du patrimoine. La Cour dont le précédent contrôle est intervenu en 1997 préconise mercredi dans son rapport 2019 une "profonde transformation" de l'institution qui emploie 350 agents et dont "le coût budgétaire s'établit à 25 millions d'euros" ou son éclatement entre la création, la gestion des objets et l'ameublement.
Comme illustration des activités incompatibles au sein du Mobilier national, la Cour cite "la guerre des colles" menée entre les conservateurs privilégiant les colles animales utilisées depuis le XVIIIe siècle, moins adhérentes mais réversibles aux colles vinyliques apparues après 1945 largement utilisées par les techniciens dans les ateliers formés à la création et non à la restauration. En 2016, un fauteuil "Vaudreuil" réalisé par le plus grand menuisier en sièges du règne de Louis XVI, Georges Jacob, estimé à un million d'euros, a vu sa valeur amputée à la suite d'une restauration malheureuse.
Le rapport pointe aussi un "taux d'absentéisme singulièrement élevé", des "quantités importantes d'alcool" sur les lieux du travail ou encore "la perruque", c'est-à-dire l'utilisation par des employés des outils pour effectuer des travaux autres que ceux pour lesquels ils sont payés. L'atelier de recherche et de création a vu son rythme de production dégringoler depuis 2011 : si en 52 ans il a produit 1.041 objets, soit 20 par an, seulement 25 objets ont été réalisés en sept ans, soit 4 par an dont plus des trois quarts sont inutilisés, écrit la Cour.
Les principales missions confiées au MNGBS "sont mal remplies, qu'il s'agisse de la gestion des collections, de leur entretien, de leur enrichissement comme de leur valorisation ou de celle de ses savoir-faire", martèle la Cour. Au 31 décembre 2017, plus de 72 % des objets restaient à "classer par catégorie de valeur". En mars 2018, la localisation de 7.872 objets soit plus de 10 % du total était "ignorée ou mal connue". Et une "part très importante des collections" est "exposée au risque de vol".
Le ministère de la Culture n'a pas répondu aux conclusions du rapport. Le directeur du MNGBS Hervé Lemoine a pour sa part souligné que "si certaines critiques sont fondées, elles méritent d'être fortement nuancées". Il cite parmi les réformes engagées le déploiement d'une nouvelle application de gestion de la collection. "Loin d'être à bout de souffle, le Mobilier national a connu une augmentation exceptionnelle de sa fréquentation ayant notamment reçu plus de 20.000 visiteurs dans le cadre des Journées Européennes du Patrimoine 2018", s'est défendue mercredi l'institution dans un communiqué. "15 000 personnes ont visité en 15 jours l'exposition Noël aux Gobelins pendant les fêtes". Le Mobilier national précise qu'il "va poursuivre dans les mois à venir son ouverture" et continuera à accueillir dans ses locaux les défilés de la maison Hermès dont le premier a eu lieu en janvier dans le cadre de la semaine du prêt-à-porter masculin à Paris.
Cet article a été publié par l'AFP le 6 février 2019.
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Le Mobilier national est « à bout de souffle », selon la Cour des comptes
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