PARIS
C'est par un coup de fil de notaire que le musée d'Orsay a appris en début d'année qu'il « héritait » de cinq oeuvres de Gustave Caillebotte, célèbre pour ses Raboteurs de parquet, détenues jusqu'alors par une descendante de l'ancien majordome du peintre.
Ces trois peintures et deux pastels étaient nichés depuis des années dans un appartement de Levallois, à l'ouest de Paris, celui de Marie-Jeanne Daurelle, arrière-petite-fille du maître d'hôtel du peintre impressionniste (1848-1894). Décédée en décembre, cette octogénaire sans héritier avait décidé de léguer l'ensemble de ses biens à la fondation des Apprentis d'Auteuil, à l'exception des cinq oeuvres de Caillebotte qu'elle possédait depuis toujours.
« C'est une histoire extrêmement touchante qui s'est faite dans la discrétion. C'était une dame très discrète qui vivait avec ses oeuvres », souligne la directrice du musée Laurence des Cars, qui a accueilli cette nouvelle « avec joie ».
Grâce à cette donation, Orsay, qui abritait sept oeuvres du peintre, double quasiment sa collection. « Ce ne sont pas des choses qu'on aurait pu s’offrir », souligne-t-on en interne, évoquant un ensemble évalué à « plusieurs millions d’euros ».
Des émissaires se sont rapidement rendus dans l'appartement de Mme Daurelle avec un commissaire-priseur et ont découvert ces oeuvres accrochées simplement au mur, comme le rapporte Le Parisien qui a mené l'enquête et interrogé l'entourage de la défunte.
Dès l'annonce de ce legs, « on était certain qu'il s'agissait d'oeuvres de Caillebotte. C'étaient des tableaux répertoriés dans le catalogue raisonné » de l'artiste, également connu pour avoir été un protecteur des impressionnistes et un immense collectionneur, poursuit Mme des Cars. Jusqu'à cette incroyable donation, la dernière oeuvre du peintre à être entrée dans les collections de l'Etat était son Autoportrait tardif, acquis par préemption en vente publique en 1971.
- En secret -
Ce cadeau fait à Orsay est d'autant plus « inespéré » qu'aucun contact préalable n'avait eu lieu avec la famille Daurelle. L'existence de ces tableaux était toutefois connue depuis la grande rétrospective consacrée au peintre au Grand palais en 1994-1995 et ils avaient aussi été prêtés lors d'expositions, souligne l’institution.
Exposées à partir de mardi dans la galerie impressionniste (salle 31) du musée, non loin des fameux Raboteurs de parquet, ces oeuvres pourront être admirées par les visiteurs: il s'agit d’Arbre en fleurs, Portrait de Jean Daurelle (en buste), Portrait de Jean Daurelle (en pied) et pour les pastels, Portrait de Camille Daurelle et Portrait de Camille Daurelle dans le parc d’Yerres. Elles possédaient un caractère intime pour Mme Daurelle, puisqu'il s'agissait de portraits de son arrière grand-père et de son grand-père.
Pour les amateurs d'art, ces tableaux -où le majordome est dépeint en bourgeois- traduisent leur époque, souligne Mme des Cars, évoquant à la fois la reconnaissance du peintre à l'égard de son employé et la progression sociale de la famille, issue du monde rural. Autre spécificité de ces oeuvres : l'usage du pastel comme chez Degas ou Manet pour les portraits d'enfants, « peut-être la part la plus précieuse de ce legs ».
« Pour nous, c'est l'occasion de souligner combien les musées dépendent de la générosité », souligne-t-on à Orsay, déjà gâté avec la donation incroyable du couple Hays, des collectionneurs texans, tombés amoureux de peinture française de la fin du XIXe et du début XXe et sous le charme des nabis.
Après une première donation en 2016, Marlene Hays, aujourd'hui veuve, a légué début juillet une centaine d'oeuvres, portant à près de 300 le nombre de pièces léguées au musée français. Parmi elles, des Bonnard, des Vuillard et des Camille Claudel...
Cet article a été écrit par l’AFP le 2 septembre 2019.
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Le legs inespéré de cinq Caillebotte au musée d'Orsay
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