Inauguré le 11 octobre à Paris, le « 104 » est d’abord conçu comme un lieu de travail pour les artistes. Ouverture de l’un des projets culturels les plus ambitieux du premier mandat de Bertrand Delanoë.
PARIS - En 2002, lors de la première édition de la Nuit blanche parisienne, le public se déplaçait massivement pour visiter l’un des lieux les plus étonnants du programme : l’ancien bâtiment du service municipal des pompes funèbres, où ont été fabriqués, jusqu’à la fin de ce monopole en 1998, tous les cercueils et décorations funéraires des inhumations de la capitale. Abandonnés, les bâtiments construits en 1873 avaient été sauvés de l’appétit des promoteurs dès 1995 par leur inscription sur l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques (ISMH). Il restait à leur trouver une nouvelle affectation. Ce sera chose faite dès l’année suivante. Rebaptisées « Le 104 » – pour le numéro 104 de la rue d’Aubervilliers –, les anciennes pompes funèbres allaient en effet devenir l’un des chantiers culturels les plus ambitieux du premier mandat de Bertrand Delanoë. Par son coût d’abord, 104 millions d’euros pour près de 40 000 mètres carrés, ce qui n’a pas manqué de susciter des réactions dans cet arrondissement parmi les plus pauvres de la capitale.
Pilotée par l’Atelier Novembre, la réhabilitation a privilégié un principe séduisant : ouvrir sur le quartier la double nef située entre la rue Curial et la rue d’Aubervilliers, dans l’esprit des passages parisiens du XIXe siècle. Le concept a ensuite été défini par les deux directeurs du lieu, désignés en 2005, Robert Cantarella et Frédéric Fisbach, deux metteurs en scène de théâtre bien décidés à « essayer de changer les modes de production artistique en France ». « Il existe beaucoup de lieux de monstration à Paris, souligne Robert Cantarella, mais peu d’espaces de travail pour les artistes. » Le 104 aura donc vocation à devenir, non un lieu sépulcral pour la création, mais un outil de travail où les artistes sont invités en résidence pour produire. En privilégiant deux axes, la transdisciplinarité – « toutes formes artistiques et toutes anciennetés », précise Robert Cantarella – et la transmission au public. Les dix-neuf ateliers bordant la rue centrale, bien équipés et modulables, sont ainsi susceptibles d’accueillir chorégraphes, musiciens, plasticiens, designers ou écrivains, sélectionnés dans le cadre d’un appel à projets ou sur l’invitation des directeurs. Tous doivent néanmoins ouvrir périodiquement leurs portes au public afin de montrer la création en train de se faire, l’artiste décidant de la durée et du mode de représentation de son travail. « C’est une chose qui s’est toujours faite au théâtre, explique Robert Cantarella. Par ce biais, nous espérons attirer les publics vers des formes d’art dont ils ne s’approchent pas d’habitude. » L’ambition affichée des deux directeurs est donc de créer un concept nouveau, « un lieu d’art correspondant à notre époque ». « Nous avons voulu inventer le laboratoire d’un autre mode de perception, en gardant à l’esprit la formule d’Antoine Vitez, “élitaire pour tous” », poursuit Robert Cantarella.
Surplombé par des tours de logement social, le 104 devra aussi devenir un équipement structurant le quartier. Un espace a ainsi été réservé pour les pratiques amateur, un autre pour l’accueil d’une pépinière d’entreprises, alors qu’une « Maison des petits » aura pour mission de sensibiliser les enfants aux pratiques artistiques. Il faudra aussi se donner les moyens de cette ambition. La Ville de Paris abonde le budget de fonctionnement du 104 à hauteur de 8 millions d’euros, à charge pour l’établissement de trouver 4 millions supplémentaires. Des espaces commerciaux (café, restaurant, librairie…) ouvriront dans le courant de l’année 2009 alors que 6 000 mètres carrés de surface sont privatisables pour différentes manifestations. « Nous verrons dans deux ans si cela fonctionne », note Robert Cantarella.
LE 104, 5 rue Curial et 104, rue d’Aubervilliers, 75019 Paris, tél. 01 40 05 51 71, tlj 11-20h, jusqu’à 22h vendredi et samedi, www.104.fr
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Laboratoire de démocratisation culturelle
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°289 du 17 octobre 2008, avec le titre suivant : Laboratoire de démocratisation culturelle