PARIS [30.03.16] - Revenue d'une restauration complexe, la très endommagée Vénus du Pardo de Titien a enfin retrouvé les murs de la salle de la Joconde qu'elle avait quitté au début des années 2000.
Cela faisait quatorze ans que La Vénus du Pardo, qui vient de regagner les cimaises du Louvre, n'avait pas été montrée au public. En 2001, cette œuvre de très grand format de Titien avait été décrochée de la salle des Etats qui abrite la peinture vénitienne et la Joconde. « Inexposable », « ruinée », les mots étaient sévères pour décrire l'état de l'oeuvre, qui a connu un parcours particulièrement mouvementé. Commencée vers 1520, cette toile a en effet été énormément transformée et altérée au cours des siècles. Elle a d'abord été reprise de la main de Titien lui-même, qui -travaillant sur l'oeuvre pendant une trentaine d'années- a agrandi sa composition et exécuté de nombreux repentirs.
Livrée à son commanditaire Philippe II d'Espagne, le tableau a ensuite voyagé à travers l'Europe (jusqu'à s’arrêter définitivement dans les collections royales françaises en 1661) ce qui l'a fragilisé. Dès le XVIIe siècle, il a fait l'objet de lourdes interventions : rentoilages, transposition sur toile, nettoyages abusifs, reprises... Résultat : l'oeuvre -très assombrie- arborait une superposition de repeints et de vernis oxydés, et avait perdu de sa lisibilité sur plusieurs zones.
A partir de 2002, le tableau est soumis à une batterie d'études pour jauger de la faisabilité d'une restauration. Avant de bénéficier de 2011 à 2016 d'un lent travail d'allégement de vernis, d'enlèvement de repeints, et de comblement de lacunes.
La toile (qui prend aujourd'hui la place d'Esther et Assuérus de Véronèse (1) dans la salle de la Joconde) apparaît aujourd'hui très éclaircie. La nature morte qui occupe le premier plan est réapparue tout comme le village qui se découpe à l'arrière. Mais si la communication du Louvre parle « d'une véritable Renaissance du tableau », les termes restent mesurés du côté des restauratrices. « On ne revient pas à un état originel du tableau, des repeints anciens ont dû être conservés car ils ne pouvaient être retirés sans risque pour la matière originale », explique Patricia Vergez, une des trois restauratrices ayant travaillé sur le tableau. « Nous ne sommes intervenues que sur les zones les plus accidentées », précise-t-elle. L'oeuvre, qui séduit par la richesse de ses bleus et de ses verts, reste très meurtrie et, selon Sébastien Allard, directeur du département des peintures, « ne devrait plus jamais voyager pour ne pas être fragilisée davantage. »
(1) Cette œuvre a été accrochée un peu plus loin dans la salle, au-dessus d'un autre tableau.
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La Vénus du Pardo de Titien, pleine de cicatrices, raccrochée au Louvre
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Abonnez-vous dès 1 €En haut ou à droite : Titien, Jupiter et Antiope, dit La Vénus du Pardo, huile sur toile, H. 196, l. 385cm. APRÈS RESTAURATION. Paris, musée du Louvre, inv. 752 © C2RMF, T. Clot
En bas ou à gauche : Titien, Jupiter et Antiope, dit La Vénus du Pardo. AVANT RESTAURATION. Paris, musée du Louvre, inv. 752 © C2RMF, Daniel Vigears