Orgueil du Musée Léon-Dierx à Saint-Denis-de-la-Réunion, le fonds Ambroise Vollard, à l’issue d’un périple international, est présenté jusqu’en avril dans ses murs. Cet événement donne un nouveau départ à l’institution réunionnaise, enfin dotée d’une conservatrice après deux ans de vacance, et appelée à cultiver son implantation territoriale.
SAINT-DENIS-DE-LA-RÉUNION - Après un périple qui l’a menée à New Delhi, Bombay, Paris et Reims, la collection Ambroise Vollard du Musée Léon-Dierx revient dans ses murs à Saint-Denis-de-la-Réunion. Cet ensemble offert par Lucien Vollard, frère du célèbre marchand et éditeur d’art, est aujourd’hui présenté de la façon la plus complète depuis son arrivée au musée en 1947. Celui-ci a été réaménagé pour l’occasion, offrant un circuit de visite plus fluide et plus lumineux pour découvrir les quelque 157 œuvres de ce fonds Vollard.
Beaucoup, lors de sa présentation au Musée d’Orsay, s’étaient étonnés de l’existence d’un ensemble d’une telle qualité dans un musée si méconnu et si lointain. L’histoire de sa création explique pourtant parfaitement ce destin singulier. Sous le patronage du poète Léon Dierx (1838-1912), qui devait donner son nom au lieu, deux écrivains, Georges Athénas et Aimé Merlo – œuvrant sous le pseudonyme de Marius-Ary Leblond –, avaient au début du siècle décidé de doter la Réunion, qui était encore une colonie, d’un musée. Ils entendaient ainsi affirmer l’appartenance de l’île à la France. La formation du musée est pour le moins originale. S’appuyant sur leurs relations parisiennes, ils sollicitent galeristes et artistes pour qu’ils participent à la constitution du fonds primitif par le don d’œuvres. Ainsi, Ambroise Vollard, originaire de la Réunion, leur donne une toile de Valtat et une peinture à l’huile sur carton de Vlaminck. Ce qui fait de l’institution réunionnaise non seulement le premier musée des colonies mais aussi l’un des tout premiers musées d’art contemporain.
Dans le même temps, les notables de l’île apportent des souvenirs ou encore des objets évoquant le mode de vie créole, ainsi que des œuvres de peintres locaux tels Antoine Louis Roussin ou Adolphe Leroy, donnant une dimension plus identitaire au musée, qui ouvre ses portes en 1912. La publication ce mois-ci d’un ouvrage sur les collections, réalisé par la Fondation BNP Paribas, donne à voir l’intérêt et la richesse de ces œuvres, mais signale néanmoins la place éminente du fonds Vollard. Son arrivée en 1947 transforme la double mission à la fois historique et artistique du lieu, qui devient essentiellement un musée de beaux-arts. Cet ensemble est constitué en majorité d’œuvres sur papier, puisque Vollard, parallèlement à son activité de marchand, a été un éditeur d’art de premier plan, publiant notamment des Albums d’estampes originales, auxquels contribuent Renoir, Degas ou encore Bonnard et Vuillard. Resté dans l’histoire comme le promoteur de l’art moderne, Vollard montre, à travers sa collection personnelle, un goût pour le moins éclectique, qui ne dédaigne pas de petits maîtres régionaux comme Gustave Colin.
Ces dix dernières années, les conservateurs qui se sont succédé ont essayé de retrouver l’âme du musée, à la fois mémorial et contemporain. Ainsi, à côté des interventions d’artistes vivants, deux expositions importantes ont été organisées, “Souvenirs de Paul et Virginie” et “Regards croisés sur l’esclavage”. Vacant pendant deux ans, le poste de conservateur est occupé depuis juillet dernier par Laurence Le Cieux, qui dirigeait auparavant le Musée Bossuet à Meaux. S’inscrivant dans la voie tracée par ses prédécesseurs, elle entend mener sur le fonds historique un travail comparable à celui qui a été accompli, notamment par Jean-Paul Le Maguet, pour l’étude et la restauration du fonds Vollard et la préparation du catalogue de la présente exposition. La tâche est immense, car la plupart des œuvres sont accrochées ailleurs, dans les bureaux de la préfecture par exemple. D’autre part, dès la fin de l’exposition “Vollard” en avril, le musée fermera ses portes pendant six mois pour refaire la climatisation. En attendant un possible agrandissement ?
- LA COLLECTION AMBROISE VOLLARD DU MUSÉE LÉON-DIERX, jusqu’au 7 avril 2002, Musée Léon-Dierx, 28 rue de Paris, 97400 Saint-Denis, tél. 02 62 20 24 82, tlj sauf lundi 9h-12h et 13h-17h. Catalogue, éd. Somogy, 228 p., 190 F. n À lire également : Le Musée Léon-Dierx, la Réunion, 120 p., 150 F.
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À la Réunion, un musée en devenir
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°139 du 21 décembre 2001, avec le titre suivant : À la Réunion, un musée en devenir