Un formidable prototype d’Eileen Gray entre dans les collections du MAD (Musée des arts décoratifs) à la faveur d’une donation exceptionnelle.
Cette rarissime coiffeuse est une pièce unique conçue par l’architecte designer Eileen Gray pour la Villa E-1027, célèbre villa moderniste de Roquebrune-Cap-Martin. Ce prototype a été dessiné en 1926 pour la chambre d’amis. Cette pièce terriblement novatrice se compose d’un tube de métal, traité telle une ligne infinie courant sur toute la structure, sur laquelle vient se poser un plateau en bois recouvert de cuir et de verre. Et sur laquelle s’accrochent d’ingénieux tiroirs pivotants
Très légère, cette coiffeuse a été conçue pour pouvoir être transportable grâce au tube de métal qui se retourne de manière à former une poignée. À l’instar de la célèbre table transportable de Gray, la coiffeuse s’inspire de l’esprit du camping alors en vogue. Sa créatrice, qui a beaucoup écrit sur ses créations, précisait toutefois que ce mobilier pratique n’était pas pour autant « froid et rudimentaire », mais au contraire sensible, qu’il devait « provoquer l’émotion et s’adapter au corps ».
Icône du modernisme, Eileen Gray était proche d’autres mouvements d’avant-garde, notamment du courant britannique du Vorticisme. Ses meubles pivotants peuvent d’ailleurs être interprétés comme une traduction en trois dimensions des concepts de la peinture vorticiste, peinture dont l’une des principales caractéristiques est l’explosion de la forme. Dans ces tableaux, les lignes constituent en effet un vortex et les formes tournent, se déplient et pivotent de manière puissamment circulaire.
Véritable pionnière Eileen Gray est l’un des premiers designers à utiliser le métal dans ses meubles. Or à l’époque, très peu d’artisans savaient travailler ce matériau, a fortiori dans le Sud de la France. Sur le chantier de la Villa E-1027 Gray fit donc appel à un plombier pour façonner les tubes de métal et construire des prototypes solides. C’était en effet le corps de métier qui maîtrisait le mieux ce matériau et notamment les difficultés inhérentes à la contorsion du tube de métal.
Le MAD a bénéficié d’une opportunité exceptionnelle, car il a reçu ce meuble en donation, alors qu’il y a très peu de pièces modernistes de cette qualité encore sur le marché et qu’elles atteignent des records lorsqu’elles passent en vente. Sa généreuse donatrice était soucieuse de l’offrir à une institution liée à Gray – la designer y a en effet exposé de son vivant. De plus, le musée possède d’autres objets de sa main dont une coiffeuse radicalement différente.
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La coiffeuse d’Eileen Gray
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°732 du 1 mars 2020, avec le titre suivant : La coiffeuse d’Eileen Gray