Michael Wilson, directeur des expositions à la National Gallery de Londres, explique sur quels critères et comment son musée établit sa programmation (portraits d’Ingres, autoportraits de Rembrandt, l’art à Florence dans les années 1470, en particulier pour cette année). Aborder des thèmes variés et exploiter au maximum les ressources du fonds permanent semblent être la clé du succès.
Quelles sont les combinaisons gagnantes d’une bonne programmation ?
Nous avons pour politique de monter un large éventail d’expositions afin d’attirer un vaste public. D’autre part, nous essayons toujours de tirer parti de notre collection. Pour Rembrandt, par exemple, nous possédons plusieurs œuvres importantes ; pour la Renaissance florentine, nous exposerons de nombreuses peintures sur bois provenant de notre fonds, que nous compléterons par des emprunts dans les domaines de la sculpture, des médailles et des objets d’ornement.
Nos expositions-dossiers, construites à partir des collections permanentes, nous permettent de proposer de nouvelles approches et de montrer certaines œuvres dans leur contexte. Nous faisons aussi appel à des intervenants extérieurs au musée pour apporter un point de vue personnel sur nos collections. Ainsi, dans “Mirror Image”, Jonathan Miller a sélectionné des œuvres pour explorer la notion de réflexion dans la peinture. Enfin, nous accueillons également des réalisations d’artistes en résidence à la National Gallery : une manière d’expliquer que les collections historiques restent pertinentes pour les créateurs contemporains. L’année dernière, Anthony Caro avait réalisé une série de sculptures inspirées des chaises peintes par Van Gogh.
Qui prend les décisions ?
Un comité de onze personnes rassemblant les huit conservateurs, le directeur Neil MacGregor, la directrice des programmes pédagogiques Cathy Adler et moi-même. Nous sommes souvent contactés par des universitaires spécialisés dans différents domaines et par des institutions. Par exemple, “L’art à Florence dans les années 1470” est organisée sous le commissariat de Nicholas Penny qui travaille pour le musée, en collaboration avec Pat Rubin de l’Institut Courtauld et Alison Wright de l’University College de Londres. Cela permet de lancer des recherches qui élargiront le champ d’observation.
Comment s’effectue la sélection des artistes en résidence ?
Il s’agit souvent de candidatures spontanées, comme Anthony Caro qui a considérablement utilisé nos collections. Actuellement, nous accueillons Ana Maria Pacheco, une artiste d’origine brésilienne qui travaille sur les scènes religieuses et mythologiques de nos tableaux. Notre mission publique étant notre priorité, il nous paraît particulièrement intéressant que les artistes en résidence aient envie de parler de leur travail et de donner des cours.
Recevez-vous souvent des critiques concernant vos expositions ?
Nous n’avons jamais fait l’objet de controverses majeures, mais nos expositions les plus expérimentales nous valent souvent un courrier important. Celle où nous présentions le célèbre Champ de blé de Constable, entouré de toutes les reproductions et objets kitsch qu’il a inspirés, a scandalisé de nombreuses personnes qui y ont vu l’avilissement d’un chef-d’œuvre.
Quel est le délai moyen nécessaire à l’organisation d’une exposition ?
Trois à quatre ans pour les grandes expositions d’œuvres empruntées à l’extérieur. Nous organisons des événements de moindre échelle lorsque l’occasion se présente. En 1996, il nous a fallu environ neuf mois pour monter l’exposition itinérante de la collection Doria Pamphilij.
Quelle est la part de l’espace consacré aux collections permanentes et de celui consacré aux expositions temporaires ?
8 800 m2 pour les collections permanentes, contre 780 m2 pour les salles d’expositions temporaires.
De quel ordre est la fréquentation de vos expositions ?
Pour l’ensemble du musée, nous enregistrons chaque année quatre à cinq millions de visiteurs. En 1997, “Les Monet de Londres”, qui comprenait vingt-cinq tableaux et dont l’entrée était libre, a battu tous les records de fréquentation avec 400 000 visiteurs en soixante jours. D’autres expositions ont également remporté un énorme succès, comme “Degas, au-delà de l’Impressionnisme” (283 000 visiteurs) et “Venise vue par Canaletto” (250 000 visiteurs). Enfin, nous avons parfois de bonnes surprises. En 1995, “Natures mortes espagnoles” avait attiré 127 000 visiteurs.
Combien d’expositions organisez-vous chaque année ?
Nous proposons chaque année trois grandes manifestations itinérantes payantes et trois expositions de moindre envergure, ainsi que des dossiers autour d’une œuvre, comme la Nativité mystique de Botticelli, par exemple. En 1999, outre Ingres, la Renaissance florentine et Rembrandt, nous présenterons “Orazio Gentileschi”, “Études de paysages des XVIIIe et XIXe siècles dans la collection Gere”, ainsi que le travail de notre artiste en résidence, Ana Maria Pacheco.
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Entretien avec Michael Wilson
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°77 du 19 février 1999, avec le titre suivant : Entretien avec Michael Wilson