POMPÉI / ITALIE
Un cycle de fresques monumentales figurant le cortège de Bacchus a été mis au jour dans la salle de banquet d’une riche « domus ».

Pompéi. « Dans un siècle, on se souviendra de cette journée comme d’une journée historique car la découverte que nous dévoilons est historique », s’est enthousiasmé le 26 février le ministre italien de la Culture, Alessandro Giuli, en présentant un très rare cycle de fresques à Pompéi. Une telle emphase est de coutume à l’annonce de la moindre découverte d’envergure sur le plus célèbre parc archéologique au monde. Mais si le recours à l’hyperbole ne sert souvent qu’à renforcer la notoriété d’un site qui n’en manque pourtant pas, la découverte de cette « mégalographie » (peinture monumentale) constitue en effet « un moment important pour l’archéologie italienne et mondiale qui dispose [ainsi] d’un document historique extraordinaire ».

La peinture a été mise au jour dans la zone 10 du quartier résidentiel « IX », sur les murs d’une riche demeure baptisée par les archéologues « maison de Thiasos ». Un nom qui dérive du mot « thiase », le groupe de satyres et bacchantes composant le cortège du dieu du vin Dionysos, ou bien celui de ses adorateurs lors d’un « culte à mystères » réservé aux initiés. Cette domus renferme en effet une des très rares frises monumentales connues représentant ce rite. Avec ses personnages grandeur nature sur un vibrant fond rouge, la mégalographie de la maison de Thiasos rivalise en tous points avec celle de la maison des Mystères, la plus célèbre et emblématique de Pompéi découverte au tout début du XXe siècle aux portes de la ville. Mais celle qui vient d’être révélée au public a pour particularité d’appartenir à une demeure située dans l’enceinte de la cité antique. Ce cycle s’étend sur les trois murs d’une salle de banquet qui s’ouvrait sur un jardin. Les fresques, datant des années 40-30 avant J.-C. et à l’état de conservation exceptionnel, représentent une procession dionysiaque à laquelle prennent part des bacchantes dansant, des chasseurs portant un chevreau égorgé, une épée ou les entrailles d’un animal, ainsi que de jeunes satyres aux oreilles pointues jouant de la flûte. Au centre de la composition trône une femme accompagnée d’un vieil homme brandissant une torche. Il s’agit d’une initianda, une femme mortelle sur le point d’être initiée aux mystères de Dionysos lors d’un rituel nocturne.
« Les bacchantes chasseresses, inspirées des Bacchantes d’Euripide, une tragédie représentée en 405 av. J.-C., après la mort de son auteur, sont devenues une métaphore de la vie d’ivresse et d’extase, explique le directeur du parc archéologique, Gabriel Zuchtriegel. Derrière le jeu mêlant illusion et réalité, on peut voir les signes d’une crise religieuse qui envahissait le monde antique. Cette découverte va nourrir le débat entre les partisans de la thèse selon laquelle ces rites n’avaient plus qu’une signification littéraire et ceux qui prônent la persistance d’une pratique religieuse. »
Les fouilles, lancées en février 2023 dans le secteur de la maison de Thiasos sur une surface d’environ 3 200 m2, vont se poursuivre en bénéficiant d’importants investissements. « Plus de 33 millions d’euros ont déjà été débloqués pour le site et nous en débloquerons d’autres, promet le ministre de la Culture. Après l’émotion vient le sens des responsabilités pour protéger, conserver et transmettre dans les meilleures conditions cette merveille. » Celle-ci est menacée par la pression touristique. Durant l’été 2024, Pompéi a attiré plus 4 millions de personnes, soit une augmentation de 33,6 % par rapport à l’année précédente. Un nombre de plus en plus difficilement gérable pour un site aussi fragile.
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Découverte d’une grande fresque dionysiaque à Pompéi
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°651 du 14 mars 2025, avec le titre suivant : Découverte d’une grande fresque dionysiaque à Pompéi