Grâce au soutien financier des Amis du Musée de Cluny, le Musée national du Moyen Âge s’enrichit d’une rare plaque émaillée, chef-d’œuvre des ateliers parisiens du XIVe siècle.
Émail translucide
L’émaillerie translucide sur basse-taille est une technique née à Sienne à la fin du XIIIe siècle. Elle s’est rapidement répandue dans les grands centres de production d’orfèvrerie, dont Paris au début du XIVe siècle. Ses qualités décoratives qui rappellent l’art du vitrail expliquent son succès dans les domaines civils et religieux. Pour faire un émail en basse-taille, on utilise un support de métal précieux, ici de l’argent, que l’on cisèle en relief très bas, un peu comme une médaille. La gravure est ensuite recouverte d’émail qui, après la cuisson, doit demeurer transparent pour ne pas cacher le dessin sous-jacent. Certaines teintes sont donc proscrites comme le blanc ou les couleurs chair qui nécessiteraient le recours à un oxyde rendant l’émail opaque. C’est la raison pour laquelle le corps du Christ est laissé en réserve. La plaque émaillée du musée de Cluny, outre l’extraordinaire qualité de sa ciselure, se distingue par son format d’une grandeur inhabituelle.
Reliquaire
De part et d’autre du corps supplicié se trouvent des baies géminées dans lesquelles devaient se loger des reliques de la Passion tandis qu’au pied de la Croix, une cavité cruciforme pouvait accueillir un fragment de la Vraie Croix, donnant à penser que le commanditaire de ce tableau-reliquaire avait un lien avec le milieu royal.
Iconographie
Cet objet de dévotion est aussi remarquable par sa double iconographie. Celle de la Crucifixion associée aux instruments de la Passion (la colonne, le fouet, les verges, la lance, l’éponge, le voile et la tunique de Véronique) et celle de l’Eucharistie symbolisée par l’hostie et le calice recueillant le sang du Christ.
Vers 1350
Une datation corroborée par le décor végétal gravé sous l’émail bleu que l’on retrouve dans les enluminures parisiennes du milieu du XIVe siècle. Quant à la typologie du Christ, elle est directement inspirée de celle de La Crucifixion du Livre d’heures de Jeanne d’Évreux, réalisé par Jean Pucelle vers 1325-1328. L’œuvre acquise renforce le petit groupe des premiers émaux translucides conservés au Musée de Cluny qui ne possédait, jusqu’à présent, qu’un fermail des années 1330-1340 et deux petits reliquaires des années 1380-1390.
540 000 €
Pour le compte du Musée de Cluny, l’État préemptait le 6 février dernier cet émail vendu à la salle des ventes d’Alençon par Orne Enchères qui le tenait d’un particulier loin de se douter du trésor en sa possession.
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Crucifixion
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°694 du 1 octobre 2016, avec le titre suivant : Crucifixion