Musée

Extension

« Cluny 4 », un projet très visible

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 1 juillet 2015 - 649 mots

PARIS

Monté sobrement, le projet de modernisation du Musée national du Moyen Âge pourrait bouleverser son image.

Nouveau bâtiment d'accueil du musée de Cluny - musée national du Moyen Âge, vue depuis le boulevard Saint-Michel, Paris. © Bernard Desmoulin.
Nouveau bâtiment d'accueil du musée de Cluny - musée national du Moyen Âge, vue depuis le boulevard Saint-Michel, Paris.
© Bernard Desmoulin.

PARIS - L’extension du Musée de Cluny, à Paris, fera certainement le bonheur du ministre de la Culture du moment, lors de son inauguration en 2018. Elle a tout pour plaire : légitimité, frugalité des moyens publics, visibilité maximum, accessibilité. L’ancien ministre de la Culture Frédéric Mitterrand avait flairé la bonne opération en l’intégrant dans son plan musées en 2010 ; Aurélie Filippetti, qui lui a succédé, a suivi le projet de près, mais ce sera (probablement) le successeur de Fleur Pellerin qui en tirera les bénéfices, tout autant que la directrice du musée. Élisabeth Taburet-Delahaye, l’anti-« conservatrice star », est à la manœuvre depuis son arrivée il y a dix ans pour monter patiemment le plan de modernisation. Mis à part le réaménagement récent de la salle de la Dame à la licorne, Cluny est le dernier des grands musées parisiens à ne pas avoir bénéficié de travaux d’envergure, et ce depuis 1956. « Notre tour est enfin arrivé », lâche la directrice. Son argument massue est l’accessibilité aux personnes en fauteuil roulant, pour l’instant impossible en raison de la configuration des bâtiments historiques – ce qui, accessoirement, plombe son classement (32e) dans le Palmarès des musées des grandes villes du Journal des Arts. La solution passe par la construction d’un nouvel accueil, abritant deux ascenseurs permettant de desservir les salles. L’organisation des lieux, pourtant complexe, est favorable, car le seul emplacement possible pour construire cet accueil est une terrasse proche de la grande artère que constitue le boulevard Saint-Michel. De sorte que cette extension résout un autre problème du musée : sa visibilité dans le quartier. Le Musée de Cluny souffre en effet d’un paradoxe : « il est presque plus connu à l’étranger qu’en France », selon sa directrice. Contrairement au Centre Pompidou ou a fortiori au Louvre qui s’imposent massivement dans le paysage urbain, le Musée de Cluny, pourtant situé en plein cœur de Paris, est si bien enchâssé dans son environnement que l’on peine à le repérer.

Entrée marquée
L’extension, d’une surface de 500 m² sur deux niveaux, assurera, selon l’architecte, Bernard Desmoulin, « une connivence entre l’architecture contemporaine et le site », tout en marquant fortement l’entrée du musée. L’architecte, le même qui réaménage actuellement l’intérieur du Grand Commun au château de Versailles, reconnaît que jamais les contraintes rencontrées n’ont été aussi fortes et s’en amuse. Il s’appuie sur la façade de l’aile restaurée au XIXe siècle, sans totalement la masquer. La résille extérieure, qui reprend un motif médiéval, est associée à une façade en fonte d’aluminium offrant des reflets moirés ; elle semble, sur le papier, se fondre dans l’environnement, en évitant le pastiche. Le financement aussi se fond dans l’air du temps, le coût de construction (7,3 millions d’euros, loin des 52 millions du Musée Picasso) est financé à 55 % par Abou Dhabi dans le cadre du projet du Louvre-Abou Dhabi (Cluny va prêter des œuvres aux Émiriens), et le reste par l’État. Le ministère va aussi prendre en charge le financement de la restauration de la chapelle et d’une partie des thermes. À charge pour le musée de solliciter le mécénat afin de payer la rénovation du parcours muséographique.

Les travaux devraient démarrer en 2016 pour une ouverture début 2018. La jauge du nombre de visiteurs ne sera pas modifiée, ainsi que la surface des salles d’expositions temporaires, mais, en sortant de la discrétion, le musée devrait retrouver sa fréquentation de 2013 (485 000 visiteurs) avant qu’elle ne chute de 36 % en 2014. Bernard Desmoulin est confiant sur le calendrier, sauf si un grain de sable venait perturber ce bel ordonnancement. Certains riverains de la rue du Sommerard, perpendiculaire au boulevard Saint-Michel, sur laquelle s’ouvrira l’accueil, sont en effet mécontents de la « piétonisation » probable de cette portion de la rue.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°439 du 3 juillet 2015, avec le titre suivant : « Cluny 4 », un projet très visible

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