À Cuba, qui souffre encore du blocus américain décrété en 1962, les libertés sont rares, à l’exception de celles réservées aux artistes qui peuvent même sortir du territoire.
Capitale de la débrouillardise et de l’invento, où chacun doit resolvar, trouver des solutions pour vivre et travailler, La Havane reste marquée par les contraintes matérielles et le manque des produits de première nécessité.
Pénurie alimentaire, coupures d’eau et d’électricité, restrictions sur l’essence… En grande partie causée par le blocus américain en place depuis 1962 et la chute de l’Union soviétique qui a coupé les vivres aux pays « frères », Cuba ne peut plus compter sur sa seule canne à sucre et ses cigares pour faire rentrer les précieuses devises de l’étranger. Avec l’équivalent de quinze dollars pour salaire mensuel, il est plus que difficile de joindre les deux bouts, sinon de se payer un logement dans la capitale.
Un « paradis » qu’il s’agit de relativiser
En dépit d’un optimisme sans faille, que la musique porte toujours dans l’air chaud de La Havane, à chaque coin de rue comme un étendard cousu d’espoir, la situation économique de l’île reflète une réalité aussi précaire qu’incertaine. Pour lutter contre l’effondrement de l’économie nationale, la « Période spéciale » ou période d’austérité décrétée par l’État en 1990, reste d’ailleurs en vigueur jusqu’à ce jour.
Malgré les défaillances du marxisme tropical, les artistes cubains bénéficient d’un statut encore privilégié, disposant entre autres du droit de sortie du territoire, de libertés commerciales comme la vente directe en atelier, et de l’accès à l’Internet. Même si les matériaux de création sont réduits à la portion congrue, voire inexistants dans certains cas – châssis, toiles, pinceaux, pigments, etc. –, rares sont ceux à quitter définitivement le pays natal. Cubanité oblige ! « Bien que je ne sois pas de La Havane, j’ai trouvé La Havane. Et puis, j’ai fait mes études, ma carrière ici, ma famille et mes amis sont ici, explique José Toirac. Maintenant, le paradis existe-t-il en tant que projet collectif ? Mais La Havane est l’endroit le plus proche du paradis que j’ai trouvé pour exercer mon art ! »
Un paradis qu’il s’agit évidemment de relativiser sur le plan pratique et plus concret de la vie quotidienne, en fonction de sa situation à l’échelle sociale. Car encore faut-il posséder un atelier pour cultiver ce genre d’activité, aussi inspirée soit-elle, si ce n’est plus simplement un toit pour s’y abriter avec les siens.
« Après avoir attendu de longues années, je me sens extrêmement privilégié d’avoir cette maison, d’avoir pu monter ces murs pour me faire ma maison, témoigne Lazaro Saavedra. Il y a tellement de gens qui n’ont pas cette chance à Cuba. Peut-être est-ce la raison pour laquelle certains artistes décident d’élire domicile à l’étranger. Parce qu’ils ne se sentent pas assez forts pour relever ce défi. » Un constat parfois paradoxal pour ceux qui pensent trouver l’herbe plus verte en dehors de leurs frontières, que ce soit aux États-Unis ou en Europe. « Car l’art n’est pas une science exacte. Et chaque artiste est libre de penser son art différemment. Comme sa propre relation à l’argent »…
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Artiste, un statut privilégié sur l’île de Cuba
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°621 du 1 février 2010, avec le titre suivant : Artiste, un statut privilégié sur l’île de Cuba