Venise

Altino : Venise... avant les Huns

Un nouveau parcours archéologique

Le Journal des Arts

Le 1 janvier 1995 - 666 mots

On a retrouvé les restes de la puissante cité d’Altino, au cœur de son système de lagunes. Détruite par les hordes d’Attila en 452, elle est l’ancêtre de Torcello et de Venise. Le nouveau parcours proposé aux visiteurs est jalonné de dessins qui expliquent et commentent le site ancien.

VENISE - À la fin du mois d’octobre, sur l’initiative de la surintendance de Vénétie, on a inauguré un nouveau parcours archéologique dans la cité romaine d’Altino, au nord du Musée national. L’identification du site remonte à 1972, qui est aussi l’année des premiers sondages à la suite desquels l’ensemble du secteur a été acquis par L’État. La zone archéologique est très vaste et englobe toute l’agglomération antique sur environ 120 hectares, comme le montrent les prospections électromagnétiques et les photographies aériennes.

Les fouilles proprement dites ont été commencées en 1980 dans le secteur nord-est, dans l’axe de l’ancien cardo maximus dont il reste fort peu de choses. Le nouveau parcours archéologique en suit le tracé, qui se terminait par une porte flanquée de deux tours octogonales, semblable à celles – contemporaines – de Turin, d’Aoste ou de Vérone. Les fouilles ont mis au jour les fondations d’une cour carrée (de neuf mètres de côté) et celles des tours, qui étaient reliées entre elles par une loggia décorée d’arcatures.

On a retrouvé, au milieu des pilotis de fondation, des fragments de coupes Sarius qui permettent de dater la construction des dernières décennies du Ier siècle av. J.-C., c’est-à-dire de l’époque proto-augustéenne. L’ensemble de la construction donnait sur un canal, formant ainsi un cadre théâtral pour l’arrivée dans la cité par la voie des eaux. La confirmation de cette hypothèse dérive aussi du fait que, peu de temps après, on a construit entre les deux tours un avant-corps, soubassement d’un pont qui enjambait le canal pour déboucher dans une rue, celle-ci étant à son tour reliée à la via Annia. Le destin d’Altino, cité florissante entre le Ier siècle av. J.-C. et le IIe siècle de notre ère, vient de sa situation sur la via Annia, qui menait d’Adria à Concordia Sagitteia et à Aquilée.

Une autre voie romaine, la via Claudia Augusta, la reliait au nord. Dans le même temps, Altino était au centre de tout un système lagunaire qui exploitait aussi bien la mer que les canaux. Avant sa destruction par les hordes d’Attila en 452, Altino est bien, en ce sens, l’ancêtre de Torcello et de Venise.

Ce secteur archéologique, qui se développe autour du decumanus (rue pavée de trachyte et bordée de portiques), est d’une grande importance, surtout pour les restes de pavement en mosaïque qui se rattachent à une vaste domus (villa) du IIe siècle de notre ère. Tout comme l’ancien parcours ouvert au public depuis les années quatre-vingt, le nouveau est jalonné de panneaux et de dessins qui expliquent et commentent le site ancien.

10 000 visiteurs par an
Une visite au musée s’impose. Fondé en 1960, il voit défiler environ dix mille visiteurs par an. Seule une petite partie de ses richesses est présentée dans les deux salles d’exposition ; plus de deux mille tombes ont été fouillées, livrant un matériel funéraire abondant. Signalons, dans la première salle, les vestiges du grand mausolée Marcello, partiellement reconstitué, et ceux d’un mausolée circulaire, tous deux du Ier siècle de notre ère. Formes, couleurs et matières diverses pour les amphores, les ollæ et les gobelets funéraires, très nombreux, ainsi que les récipients de verre datés pour la plupart de la première période paléo-vénète, aux deux premiers siècles de l’empire.

Dans la seconde salle, les objets les plus précieux sont deux statues acéphales en forme de triton, du Ier siècle de notre ère, toujours vestiges de monuments funéraires. La prodigieuse quantité d’objets retrouvés tient aussi au fait qu’à la différence d’autres zones archéologiques (nombreuses en Vénétie), le site n’a pas été réoccupé après sa destruction par les Barbares. Cette année, on espère pouvoir transférer le musée dans ses nouveaux locaux, deux grands édifices restaurés à proximité.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°10 du 1 janvier 1995, avec le titre suivant : Altino : Venise... avant les Huns

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