Mochebourg
Bon anniversaire Centre Pompidou ou, plutôt, bon anniversaire « Mochebourg » ! Formé à partir du jeu de mots beau-bourg, cet aimable sobriquet a été le surnom donné par les détracteurs du centre à Beaubourg. Certes, quand il est aujourd’hui repris sur les réseaux sociaux, il a davantage valeur affective, voire de gag facile, que d’une virulente critique architecturale ou culturelle. Mais cela n’a pas toujours été le cas. Il faut se remémorer la violente charge à laquelle l’institution fut sujette au moment de son ouverture, il y a quarante ans. « Il n’y a pas de quoi être fier ! », écrivait à son propos l’historien et critique d’art Pierre Cabanne. De quoi ? De ce « hangar de l’art », titrait un journal. « Le pari a été tenu : la carcasse du plus grand centre culturel d’Europe est enfin debout. Que mettra-t-on dans ce corbillon géant ? Beaucoup de gens ont, là-dessus, beaucoup d’idées », regrettait un autre. Les dessinateurs de presse ne furent pas plus tendres avec le projet. En 1977, José dessinait un centre tout en tubes avec cette légende, plutôt bien trouvée : « Maintenant que les échafaudages sont enlevés, c’est tout de même autre chose ! » Avant lui, le 30 décembre 1976, son confrère Bernard Chenez donnait son point de vue en dessinant un Beaubourg en grand magasin, avec escalator, signalétique promotionnelle et ce titre : « Beaubourg, un malédifice ? » Quarante ans après l’ouverture de ses portes au public, le 2 février 1977, le « malédifice » en question campe toujours ses couleurs (proposées à l’époque par Jean Dewasne) sur le plateau Beaubourg. L’institution, mariage osé d’un musée (le Mnam/CCI), d’une bibliothèque (la BPI) et d’un institut de recherche musicale (l’Ircam), s’est installée dans le paysage culturel français et international. Certes, elle a connu des succès et des ratages, des expositions merveilleuses et d’autres très critiquées, une période d’incertitude avant une fermeture de plusieurs mois jusqu’à la réouverture du centre en 2000, des grèves à répétition, etc. Mais, dans un entretien accordé au Monde en octobre 1972, Georges Pompidou entrevoyait déjà la faiblesse de son grand projet : « Le problème, dans un projet de ce genre, confiait le président de la République, c’est de le réaliser, bien sûr, mais c’est surtout qu’il vive. » Le centre vit donc, depuis quarante ans même, et ses échecs sont connus. « Mochebourg » n’est pas parvenu à défendre la création française à l’étranger ni à orchestrer la pluridisciplinarité qu’il devait défendre ; il a par ailleurs échoué à rester ouvert sur la ville et sur les gens, sans éviter de glisser du côté du patrimoine en se muséifiant… Pourtant, le projet initial de « Centre national d’art et de culture Georges Pompidou », lui, n’a pas pris une ride. Cet outil révolutionnaire de diffusion dynamique de la culture fait même école,
du MoMA (New York) à la Tate (Londres), en passant par le Quai Branly et la Philharmonie (Paris), qui reprennent à leur compte les ingrédients de sa réussite (le mélange des publics, des genres, etc.). Disons-le : l’utopie du Centre Pompidou était si puissante qu’elle reste, en 2017, toujours d’actualité. Beaubourg l’a bien perçu, lequel, pour fêter ses 40 ans, présente un programme d’expositions, de prêts et d’événements dans quarante villes en France. Pour refaire rayonner le centre, la culture, et revenir aux fondamentaux.
Montebourg
On l’attendait de Manuel Valls, fils du peintre Xavier Valls et mari de la violoniste Anne Gravoin. Il est finalement venu d’Arnaud Montebourg. « Le manifeste culturel pour mettre l’art et la culture au cœur d’un projet commun », dévoilé en janvier à la Maison de la poésie à Paris, est, il est vrai, fortement inspiré par Aurélie Filippetti, ancienne ministre de la Culture de François Hollande (2012-1014) et compagne du candidat à la primaire socialiste. Ce document de sept pages compose donc le socle culturel du Projet France, quand les autres programmes se contentent souvent pour le moment d’une simple note d’intention sur leur site – confondant parfois culture (la production des œuvres d’art et de l’esprit) et culture (le ciment de la nation : son histoire, sa langue, etc.). S’il reprend un terme bien ancré dans le vocabulaire des arts plastiques, ce « Manifeste » formule plusieurs propositions intéressantes en direction de la création, des territoires et de l’éducation artistique et culturelle, en prenant soin au passage d’épargner le bilan de Filippetti (la défense de l’exception culturelle ou la loi Création, Architecture et Patrimoine). Parmi ces propositions, celle d’augmenter le budget de la Culture de 500 millions d’euros par an n’est pas passée inaperçue. C’était son but. Candidate aux primaires socialistes de 2011, Martine Aubry avait déclaré vouloir augmenter le budget de la Culture de 30 à 50 %. Cela avait fait beaucoup causer à l’époque, sans lui porter chance.
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Mochebourg - Montebourg
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°698 du 1 février 2017, avec le titre suivant : Mochebourg - Montebourg