Interdit au public

Par Jean-Christophe Castelain · L'ŒIL

Le 1 juillet 2006 - 314 mots

Que l’accueil du public figure dans les missions traditionnelles des musées, au même titre que la conservation et l’exposition des œuvres, est une évidence. C’est même l’un des thèmes de notre troisième édition du Palmarès des musées. Un classement annuel bien approprié à la période estivale, toujours propice à la découverte des lieux culturels et de leurs expositions temporaires.

Mais quelles sont les attentes du public ? Des horaires adaptés, des tarifs raisonnables, des lieux de repos ou de restauration, une librairie ; tout cela est entendu et, dans l’ensemble, les musées y pourvoient. Mais l’accueil c’est aussi la pédagogie. Et là, beaucoup reste à faire. L’institution reste fondamentalement janséniste à cet égard. Les aides à la visite sont d’une sobriété affligeante. Beaucoup de conservateurs sont convaincus que la grâce finira bien par toucher le pénitent en face des œuvres et que le pauvre pêcheur trouvera tout seul les clés d’une scène mythologique de la Renaissance ou d’un monochrome d’Yves Klein.
C’est hélas aussi le grand défaut de la Triennale du Grand Palais. « La Force de l’art » ou comment ruiner une excellente idée et des pièces de qualité par une scénographie franchouillarde. Les régisseurs se sont ingéniés à placer les cartels minimalistes le plus loin possible des œuvres. Les textes sur le point de vue de chacun des quinze commissaires, imprimés sur les affiches à l’entrée des stands, sont incompréhensibles et, de toute façon, littéralement illisibles. Les brochures gratuites ou payantes accompagnant la visite sont d’une rare indigence et complaisance. Il n’y a pas de catalogue qui aurait été si utile pour disposer d’un instantané sur la création française. Quant aux médiateurs présents sur les stands, ce n’est pas trois jours de formation qui ont pu les transformer en pédagogues. Moyennant quoi la manifestation est loin d’attirer les 250 000 visiteurs espérés par l’entourage du ministre. Mépriser le public n’est jamais payant.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°582 du 1 juillet 2006, avec le titre suivant : Interdit au public

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