Collection de critiques. Le ministère de la Culture les accumule chaque jour un peu plus : trop de communiqués d’autosatisfaction, trop de bulletins nécrologiques, trop de communication en somme afin de masquer l’essentiel : l’assèchement par l’Élysée de son pouvoir décisionnaire. « Il faut vraiment prendre garde que le ministère de la Culture ne devienne pas uniquement un ministère de façade – un ministère Potemkine – qui aurait abdiqué une partie de sa responsabilité. » L’auteur de cette déclaration au Monde a certes le cœur lourd et règle ses comptes avec son ministre de tutelle qui ne l’a sans doute pas défendu lors de la nomination de Catherine Pégard, journaliste politique et conseillère du président de la République, à la présidence du domaine de Versailles. Mais l’ancien ministre du gouvernement Raffarin, qui « habitait » le château depuis 2007, clame tout haut ce que d’aucuns chuchotent : l’un des faits marquants du quinquennat de Nicolas Sarkozy aura été l’affaiblissement des ministres Christine Albanel et Frédéric Mitterrand. Car, depuis 2007, c’est à l’Élysée et non Rue de Valois que sont décidés les nominations et les grands chantiers culturels. Résultat : le corps des conservateurs et les professionnels de la culture s’agacent de savoir leurs compétences bafouées. « Non au nouveau fait du prince à Versailles ! La nomination de Mme Pégard est honteuse », dénonce Laurent Gervereau, président du Réseau des musées d’Europe. Les couloirs de nos institutions culturelles grondent de colère. À quelques mois de la présidentielle, l’Élysée peut-il encore ne pas l’entendre ?
Collectionnée ? « Je réalise des œuvres pour qu’elles vivent. Lorsque j’ai imaginé celle-ci, je n’ai à aucun moment pensé à sa disparition. » Claudio Parmiggiani ne cache pas sa souffrance de voir disparaître, à moins d’un miracle, Naufrage avec spectateur, œuvre qu’il a réalisée en 2009 pour l’église du village de Morsiglia en Corse : une ancienne embarcation de plus de 14 m que l’artiste italien a saignée en trois dans sa longueur avant de l’échouer dans l’imposante nef repeinte en blanc, la proue face à la mer. Une œuvre forte, émouvante, et en sursis, dans l’attente de son sauvetage. Il se murmure que Parmiggiani serait prêt à faire un geste pour celle ou celui qui l’arrachera de la disparition. Comme un ultime SOS envoyé aux collectivités, aux musées, aux collectionneurs…
Collectionneuse, la nouvelle génération d’amateurs d’art contemporain l’est sans aucun doute. Ils ont la trentaine et un peu plus, sont héritier des Galeries Lafayette, cofondateurs de Pixmania.com, et partagent le même goût d’entreprendre autour de l’art contemporain. Mécènes d’expositions, ils ouvrent leur collection au public, créent des prix, des résidences d’artistes, des fondations, soutiennent la création émergente… Ce sont des collectionneurs d’un nouveau genre, « entrepreneurs », qui n’ont plus peur de montrer leur collection au monde et au fisc, quand leurs aînés ont trop souvent vécu repliés sur eux-mêmes. Dans son dernier roman qu’il consacre à l’amour de la collection, Sous la dictée des choses (Seuil, 22 e), Alain Fleischer remarque que « le collectionneur aime souvent faire lui-même partie d’une collection : la famille des autres collectionneurs passionnés par le même objet ». Une famille que l’on a réunie dans ce numéro de L’œil pour une photo-souvenir, et qui entendra peut-être les appels de détresse d’une œuvre naufragée au beau milieu du Cap Corse…
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Collection, collectionnée, collectionneuse
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°639 du 1 octobre 2011, avec le titre suivant : Collection, collectionnée, collectionneuse