Société

Éditorial

Charybde et Scylla

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 12 mars 2020 - 397 mots

Société. Il y a pire que le Covid-19, c’est la psychose que le virus crée et ses conséquences sur la vie économique et sociale.

Le chemin de crête est étroit entre le bien-fondé des mesures visant à limiter le nombre de décès dus au virus et les effets en cascade des restrictions de rassemblement et de déplacement. Poussées à l’extrême, surinterprétées, ces mesures peuvent désorganiser le système de santé, paralyser la vie économique, interrompre la chaîne alimentaire, déliter le corps social hanté par la suspicion à l’égard de l’autre. Le Covid-19 est-il plus dangereux que la grippe espagnole qui a fait tant de morts au lendemain de la guerre espagnole et dont un récent article du Monde rappelait comment les autorités de l’époque en avaient caché la réalité pour ne pas aggraver la situation d’après-guerre ?

Fort heureusement, nous ne sommes pas en 1919, et la crise – financière celle-là – de 2007-2008 montre que les sociétés sont résilientes. Il faut aussi reconnaître à l’État sa bonne gestion de la communication de l’épidémie. En prenant des mesures « évolutives et proportionnées », en jouant la transparence et en adoptant un ton mesuré, il contribue à faire baisser la pression. Même les médias, après la phase alarmiste des débuts, ont pris conscience de leur responsabilité. Ne pas en rajouter pour ne pas trop inquiéter.

Inutile d’énumérer les conséquences économiques de la crise sur les musées et entreprises culturelles. Si les premiers vont traverser tant bien que mal la tempête avec quelques coupes dans leur programmation, il en va différemment du secteur privé qui pourrait connaître de nombreuses « défaillances », en clair des dépôts de bilan. Dans notre secteur, les foires qui n’appartiennent pas à des grands groupes, les galeries ou les maisons de ventes sont particulièrement exposées. Rappelons que cette crise sanitaire, doublée aujourd’hui d’une crise boursière, s’ajoute aux manifestations des « gilets jaunes » et aux grandes grèves des transports en commun.

Dès lors, Franck Riester, dont on a appris qu’il était lui aussi contaminé, va devenir bien malgré lui un symbole fort car c’est une personnalité de premier plan. On lui souhaite sincèrement de se rétablir très vite. En revenant guéri à son bureau de la rue de Valois, il montrera à tous que le Covid-19 est moins dangereux qu’on ne le croit et il contribuera ainsi à réduire la psychose. Un enjeu qui dépasse largement le périmètre de son ministère.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°541 du 13 mars 2020, avec le titre suivant : Charybde et Scylla

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