MONDE
Constatons que GoogleArtProject a fortement élargi son offre. Cent cinquante-cinq institutions d’Afrique, d’Amérique, d’Asie, d’Europe, du Moyen-Orient et d’Océanie offrent aujourd’hui plus de 32 000 œuvres souvent numérisées en haute définition.
Parfois Google a lui-même réalisé les prises de vue, souvent il a agrégé les images que lui ont confiées les musées. Une cinquantaine d’entre eux bénéficient du navigateur streetview. En cliquant sur le petit bonhomme, l’internaute se promène dans les salles, comme un voyeur scrutant l’écran d’une vidéosurveillance. La qualité est encore inégale, des bugs peuvent surgir, mais le vacancier consciencieux prépare ses visites, celui-ci qui préfère « la chaleur brillante du regard » se les remémorera. Surtout, GoogleArtProject devrait servir à ceux qui ne peuvent voyager, pour des raisons économiques, physiques, politiques, si bien sûr le moteur de recherche est accessible dans leur pays. Ainsi, un jeune d’Afrique, d’Asie voit les images de musées d’Europe, compare des accrochages, étudie les détails d’un tableau en haute résolution, lit la documentation sur l’artiste, parcourt une sélection de son œuvre rassemblée dans différentes institutions. Google étend son champ d’action en signant, avec l’Unesco, un accord pour faire migrer sur les 890 sites classés patrimoine mondial les technologies Google Map, Earth et Street view. L’offre balbutie, mais est en marche.
Interrogeons-nous sur les motivations de la société de la Silicon Valley. Numériser, photographier, diffuser a un coût, or l’accès au site est gratuit, la publicité y est absente, comme la commercialisation des images et, assure-t-on, celle de la traçabilité des internautes. En réussissant à apaiser ses relations avec les institutions, Google espère accroître son vivier de ressources et imposer encore plus sa marque face à ses concurrents. Avec cette vitrine d’un savoir-faire technologique mis au service de tous, il vise à étendre la communauté des Google addicts, à rendre son moteur de recherche incontournable. Cette stratégie de monopole – appuyée sur des innovations et des réussites – doit aiguillonner les musées (le dossier du JdA 363). À eux de définir, puis d’obtenir, les moyens d’une véritable stratégie numérique, marketing, mais avant tout scientifique et éducative. Celle-ci bute sur un préalable concernant l’utilisation des images, qui renvoie à la vocation et à la gratuité des musées. Si les collections publiques sont destinées à être partagées et étudiées par tous, pourquoi leurs images en haute résolution ne seraient-elles pas disponibles gratuitement ? Contre paiement uniquement pour une exploitation commerciale ? Des musées, comme le British Museum, permettent ce téléchargement gratuit que GoogleArtProject n’offre pas. Cette condition levée, à eux de décider ensuite s’ils restent autonomes ou se fondent dans un ensemble, si les garanties contractuelles sont satisfaisantes.
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Bon voyage avec Google ?
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°372 du 22 juin 2012, avec le titre suivant : Bon voyage avec Google ?